En dix ans en France, la consommation d’eau en bouteille est passée de 75 à 145 litres par an et par habitant. Un engouement qui attise les convoitises des grands groupes industriels.
Pourtant, chaque foyer dispose d’une eau du robinet potable, disponible à un prix défiant toute concurrence.
Pourtant, chaque foyer dispose d’une eau du robinet potable, disponible à un prix défiant toute concurrence.
- Comment les marques parviennent-elles à convaincre les consommateurs de préférer l’eau en bouteille ?
- Que valent réellement les promesses des eaux minérales, vantées par les enseignes qui les produisent ?
- Et comment un marché des «eaux de luxe», qui se vendent dix à quinze fois plus cher que les eaux classiques, a-t-il pu voir le jour ?
Source (sans jeu de mots) : UFC Que choisir
Eau du robinet, eau en bouteille ou eau filtrée à domicile, quelle eau boire ? Le choix n'est pas toujours facile, tant les informations sont multiples et contradictoires, les publicités influentes et les intérêts économiques puissants.
L'eau du robinet
C'est un paradoxe. L'eau du robinet suscite de la méfiance bien qu'elle soit très contrôlée. Sauf cas particuliers peu fréquents, c'est une eau potable, c'est-à-dire conforme aux exigences sanitaires définies par décret. Cinquante-quatre paramètres différents font l'objet d'une surveillance et sont régulièrement contrôlés.
Ce sont les services Santé et Environnement des DDASS, les Directions départementales des affaires sanitaires et sociales, qui en sont chargés. Localement, les services responsables des usines de traitement pour la potabilisation et des réseaux de distribution font également leur propre suivi. Il est quasi permanent sur les grands réseaux qui alimentent de grandes villes ou les communautés de communes, moins fréquent sur les petits réseaux qu'on peut trouver en zone rurale.
Mais les grandes alertes sur la dégradation de la qualité de l'eau du robinet lancées dans les années 1990 par « Que Choisir », dès 1990 d'ailleurs pour les nitrates, puis pour les pesticides, ne sont plus d'actualité. Depuis, les stations de traitement se sont multipliées, les captages d'eau potable pollués par les nitrates et/ou les pesticides sont régulièrement abandonnés. Si les rivières et les nappes souterraines sont toujours très contaminées, la pollution de l'eau du robinet par les nitrates devient rare, et les dépassements de normes sur les pesticides peu fréquents.
Concernant le plomb au robinet, un problème soulevé en 1999 par « Que Choisir », la réglementation s'est durcie. La limite réglementaire a été abaissée de 50 à 25 µg/l (microgrammes par litre) pour l'eau potable, et les branchements publics en plomb doivent être remplacés au plus tard en 2013 (le programme est d'ailleurs bien avancé). Le problème peut encore concerner des immeubles anciens, quand des conduites intérieures en plomb desservent des cuisines. En cas de doute, il faut éviter de consommer le premier jet du matin. C'est en effet quand l'eau stagne dans les canalisations qu'elle peut se charger en plomb, il faut donc la laisser couler quelques instants avant la première utilisation de la journée. Sauf cas particuliers, l'eau du robinet est donc potable et de qualité.
L'eau en bouteille
Force est de constater que les eaux en bouteille perdent du terrain en dépit des campagnes de publicité qui se succèdent à un rythme soutenu : -6,5 % en 2007, -7,5 % en 2008, et encore -2 % en 2009. La baisse du pouvoir d'achat et la crise économique y sont sans doute pour beaucoup, mais les eaux en bouteille doivent compter avec un nouvel ennemi, la prise de conscience de leur impact environnemental. Nul n'ignore plus que le transport par camion émet des gaz à effet de serre et que le meilleur déchet est celui qu'on ne produit pas. Or, quand il s'agit d'eau, il suffit de passer à celle du robinet pour éviter les déchets plastique, rien de plus simple. Il existe deux grandes catégories d'eaux en bouteille : les eaux minérales et les eaux de source. Elles sont d'origine souterraine, comme d'ailleurs les deux tiers de l'eau du robinet distribuée en France.
Les eaux minérales
Les eaux minérales présentent une forte particularité, elles ne répondent pas à la même réglementation que l'eau du robinet. Certaines seraient refusées en réseau public de distribution, car elles ne sont pas conformes aux critères qui définissent une eau potable. Elles sont soumises à des normes spécifiques et peuvent atteindre des teneurs qui ne sont pas tolérées pour l'eau potable. Concernant le fluor, par exemple, la limite est fixée à 1,5 mg/l pour l'eau potable, les eaux minérales peuvent en revanche en contenir jusqu'à 5 mg/l. La composition d'une eau minérale doit rester stable dans le temps, et, comparées à l'eau du robinet, les eaux minérales ont droit à peu de traitements. On peut intervenir sur le fer, le manganèse, le fluor, mais on ne fait aucun traitement de désinfection. Les différences entre les marques tiennent aux écarts de minéralisation, c'est-à-dire aux teneurs en calcium, magnésium, fluor, sulfates, sodium... Certaines eaux très minéralisées ne conviennent pas forcément à un usage quotidien ; mieux vaut en vérifier la composition, obligatoirement indiquée sur l'étiquette.
Les eaux de source
Contrairement aux eaux minérales, les eaux de source sont soumises à la même réglementation que l'eau du robinet, c'est-à-dire qu'elles doivent remplir tous les critères de potabilité. En revanche, comme les eaux minérales, les eaux de source ne doivent pas subir de traitements de désinfection. Leur composition peut varier dans le temps. Quand on prend l'habitude d'acheter une eau de source pour sa composition, il importe donc de vérifier son étiquette de temps à autre. D'un nom à l'autre et même d'une bouteille à l'autre, la teneur en minéraux d'une eau de source peut également varier sensiblement. Une même appellation d'eau de source peut en effet venir de plusieurs sources implantées dans différentes régions, et sa composition change évidemment en fonction de l'origine. Mais, en magasin, les bouteilles portent le même nom, il faut donc vérifier celui de la source et détailler l'étiquette pour repérer les différences.
L'eau des carafes filtrantes
Le marché de l'eau en bouteille est en recul, alors que l'eau du robinet suscite toujours de la méfiance. Il y avait donc une place à prendre, et ce sont les carafes filtrantes qui l'occupent, Brita en tête. De 200 000 appareils vendus en 2000, le numéro un du secteur est passé à 1 million en 2008, avant de battre un nouveau record l'an dernier avec 1 250 000 carafes écoulées. Au total, il s'est vendu 1,5 million de carafes filtrantes en 2008 et pas loin de 2 millions l'an dernier.
Ce succès grandissant des carafes filtrantes se justifie-t-il ? Pour se prononcer en toute objectivité, « Que Choisir » a réalisé deux tests en laboratoire. Le premier portait sur des carafes neuves achetées en magasin, le second sur l'eau du robinet et l'eau filtrée de 31 familles volontaires habitant différentes régions. Si les carafes neuves répondent en partie à leurs promesses, même si elles présentent quelques faiblesses, au domicile des utilisateurs de carafes qui ont fait tester leur eau, c'est en revanche catastrophique. Sur les 31 analyses, il n'y en a pas une pour sauver la mise à la filtration de l'eau ! Alors que la plupart de ces logements reçoivent une eau du robinet potable, l'eau filtrée est dégradée.
L'eau à quel prix ?
Le prix du litre moyen des différentes eaux de boisson est éminemment variable. La grande gagnante, c'est l'eau du robinet, à 0,002 euro le litre en moyenne. Quand on utilise une carafe filtrante, le prix du litre est en moyenne multiplié par 20 (0,04 euro), et il explose dès qu'on passe aux eaux en bouteilles : 0,20 euro le litre pour l'eau de source, 0,40 euro le litre pour l'eau minérale, soit 100 à 200 fois plus que le litre d'eau du robinet.
HS
Wakeupinfo