Schématiquement, toute théorie ou anti-théorie du complot s’enracine soit dans la volonté de défendre un intérêt ou une idéologie spécifique, soit dans la volonté de promouvoir la « vérité » au sujet des événements historiques observés.
Des discours de mauvaise foi s’opposent donc à des discours de bonne foi, dans un camp comme dans l’autre, et toute la difficulté consiste donc à prendre en compte les intérêts et les idéologies défendus par chacun, sans pour autant réduire la critique à une série d’arguments ad hominem consistant à attribuer crédit ou discrédit à différents discours sur la seule base du locuteur qui les prononce.
Ce n’est pas parce qu’un individu est ingénieur chez Monsanto, ministre du gouvernement ou journaliste dans un grand média que son discours doit être tenu pour a priori vrai ou a priori faux. C’est l’épreuve des faits et le respect de la logique qui doivent constituer la norme de vérité en cette matière comme en toute autre.
Pieux mensonges d’État et démocratie
La légitimité morale du pieux mensonge renvoie à un questionnement philosophique millénaire vis-à-vis duquel il n’est pas nécessaire de prendre parti dans le présent billet. On se bornera à indiquer qu’en la matière, l’approche « déontologique » défendue par des penseurs visant la vérité comme Kant ou Platon s’oppose à une approche « utilitariste » défendue par des penseurs visant l’accès au bonheur comme Rousseau ou Mill.
Que tous les mensonges proférés ne soient pas pieux est une évidence, mais penser que tous les mensonges sont proférés avec une intention mauvaise est en revanche le signe d’un complotisme extrême et pathologique. Oui, on nous ment sans doute, mais pourquoi penser que tout mensonge reflète nécessairement une mauvaise intention à l’égard du peuple en général ou d’une minorité de Français en particulier ? Prémunissons-nous donc contre ce type de complotisme et partons du principe que les mensonges qui font diverger Histoire réelle et Histoire officielle trouvent leur origine dans de bonnes intentions.
Autrement dit, le pieux mensonge repose de facto sur la distinction de deux classes sociales : l’une, éclairée et informée, décidant pour une autre, confuse et désinformée. D’ailleurs, dans cette interview édifiante datant de 2009, François Hollande lui-même dénonçait la logique perverse du mensonge d’Etat proféré au nom de la lutte contre le terrorisme.
Théorie de l’esprit
Comme nous l’avons vu plus haut, lorsque la vérité est occultée au sujet d’événements importants, quand bien même ce serait pour faciliter une gouvernance orientée vers le bien public, il peut s’ensuivre une perte de confiance importante dans le discours officiel, qu’il provienne directement de ceux qui gouvernent ou des médias qui relayent leurs propos. Ainsi, le citoyen se retrouve dans l’expectative et le champ des « vérités possibles » s’élargit d’autant : à la difficulté de comprendre des faits déjà formidablement complexes s’ajoute donc une incertitude sur les faits eux-mêmes.
Vers une « théorie des complots » ?
Pour conclure, la meilleure façon de lutter contre les théories du complot reste donc de tenir les citoyens pour des êtres responsables, aptes à comprendre les enjeux de leur époque et ultimes dépositaires des orientations prises par leur gouvernement en matière de promotion du « bien » et de lutte contre le « mal ». En plus d’être indispensable à l’existence de la démocratie, la communication des informations et des rapports d’enquête en matière de terrorisme est essentielle pour combattre des théories délirantes qui font plus de mal à la société française que les non-dits dans lesquels elles s’enracinent.
Des discours de mauvaise foi s’opposent donc à des discours de bonne foi, dans un camp comme dans l’autre, et toute la difficulté consiste donc à prendre en compte les intérêts et les idéologies défendus par chacun, sans pour autant réduire la critique à une série d’arguments ad hominem consistant à attribuer crédit ou discrédit à différents discours sur la seule base du locuteur qui les prononce.
Ce n’est pas parce qu’un individu est ingénieur chez Monsanto, ministre du gouvernement ou journaliste dans un grand média que son discours doit être tenu pour a priori vrai ou a priori faux. C’est l’épreuve des faits et le respect de la logique qui doivent constituer la norme de vérité en cette matière comme en toute autre.
Pieux mensonges d’État et démocratie
La légitimité morale du pieux mensonge renvoie à un questionnement philosophique millénaire vis-à-vis duquel il n’est pas nécessaire de prendre parti dans le présent billet. On se bornera à indiquer qu’en la matière, l’approche « déontologique » défendue par des penseurs visant la vérité comme Kant ou Platon s’oppose à une approche « utilitariste » défendue par des penseurs visant l’accès au bonheur comme Rousseau ou Mill.
Autrement dit, le pieux mensonge repose de facto sur la distinction de deux classes sociales : l’une, éclairée et informée, décidant pour une autre, confuse et désinformée. D’ailleurs, dans cette interview édifiante datant de 2009, François Hollande lui-même dénonçait la logique perverse du mensonge d’Etat proféré au nom de la lutte contre le terrorisme.
Théorie de l’esprit
Comme nous l’avons vu plus haut, lorsque la vérité est occultée au sujet d’événements importants, quand bien même ce serait pour faciliter une gouvernance orientée vers le bien public, il peut s’ensuivre une perte de confiance importante dans le discours officiel, qu’il provienne directement de ceux qui gouvernent ou des médias qui relayent leurs propos. Ainsi, le citoyen se retrouve dans l’expectative et le champ des « vérités possibles » s’élargit d’autant : à la difficulté de comprendre des faits déjà formidablement complexes s’ajoute donc une incertitude sur les faits eux-mêmes.
Vers une « théorie des complots » ?
Pour conclure, la meilleure façon de lutter contre les théories du complot reste donc de tenir les citoyens pour des êtres responsables, aptes à comprendre les enjeux de leur époque et ultimes dépositaires des orientations prises par leur gouvernement en matière de promotion du « bien » et de lutte contre le « mal ». En plus d’être indispensable à l’existence de la démocratie, la communication des informations et des rapports d’enquête en matière de terrorisme est essentielle pour combattre des théories délirantes qui font plus de mal à la société française que les non-dits dans lesquels elles s’enracinent.
Le simple fait d’envisager l’existence de tels non-dits et de la désinformation – si communs dans l’Histoire – ne doit pas être identifié à une démarche complotiste. En tant que fondement de l’intellect humain, le doute doit être respecté, en particulier lorsque les anomalies s’accumulent et que de nombreuses questions restent sans réponses : seules les conclusions délirantes qu’il suscite doivent être combattues.
Extrait du texte Rue89
Extrait du texte Rue89