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Le 2 mars 1991, il y a 31 ans, Serge Gainsbourg, génial et turbulent monument de la chanson, nous quittait en pleine gloire. Pour voir son influence gagner en importance, année après année. A l'heure des commémorations, que reste-t-il à découvrir ?

Qui est out ? Certainement pas Serge Gainsbourg, éternellement in, qui, bien que mort et enterré, n'a toujours pas rejoint les oubliettes. Un quart de siècle après son décès, le 2 mars 1991, le chanteur n'a pas besoin de célébrations mortuaires pour faire partie du paysage, à la différence d'autres « vedettes » de la chanson, Daniel Balavoine, Dalida ou Joe Dassin que l'on exhume le temps d'un anniversaire. Une singularité qui tient moins à son personnage de dandy provocateur qu'à l'insolente modernité de son répertoire. Culture classique, écriture à tiroirs, sens de la formule : cette œuvre où se bousculent « concept albums », chansons à texte et petites pépites pop, étonne surtout par sa diversité musicale et la pertinence de ses inspirations. L'homme humait bien l'air du temps et savait s'entourer…


Des fans de Londres à New York
Gainsbourg connaît même désormais une reconnaissance dont il avait rêvé toute sa vie : celle du public anglo-saxon. Pas le tout venant bien sûr, mais de nombreux artistes, acteurs et musiciens qui, de Londres à New York, encensent l'auteur de La Javanaise, de Melody Nelson et de L'Homme à tête de chou. Beck, Franz Ferdinand, Placebo, Jarvis Cocker, Marc Almond, Mick Harvey comptent ainsi parmi ses fans autoproclamés. Ses chansons ont même fait l'objet de plusieurs albums de reprises dans la langue de Shakespeare, parmi lesquels Intoxicated Man (1995), Pink Elephants (1997) ou Mister Gainsbourg revisited (2006). Derrière cet engouement post mortem, la mondialisation, l'éclectisme de l'époque, le libre accès permis par Internet et surtout des « passeurs », proches, familiers ou égéries du grand Serge qui ont diffusé sa parole et ses musiques au-delà des mers : Jane Birkin, Charlotte Gainsbourg, Marianne Faithfull, Isabelle Adjani, Vanessa Paradis, Air… Son fils « Lulu » Gainsbourg, chanteur et compositeur installé à Londres, lui a également consacré un album hommage, From Gainsbourg to Lulu en 2011, qui réunissait entre autres Scarlett Johansson, Johnny Depp, Iggy Pop et Rufus Wainwright.

« Plus grand mort que vivant », Gainsbourg, le Duc de Guise de la chanson française, n'a donc jamais cessé de faire les beaux jours d'Universal, sa maison de disques. Deux « Intégrales » (!) ont ainsi vu le jour à quelques années d'intervalle, en plus d'innombrables anthologies, rééditions et compilations. Ce vingt-cinquième anniversaire ne faillit pas à la règle avec London Paris, un florilège des titres pop que le chanteur a enregistré entre 1963 et 1971, avec les producteurs britanniques Arthur Greenslade et David Whitaker ou ses fidèles Michel Colombier et Jean-Claude Vannier. Aux côtés des inévitables (et inégalés) Initials BB, Sucettes, Bonnie & Clyde et autre Hôtel particulier, un instrumental inédit de 69, année érotique. A noter également Gainsbourg and Co, un double CD où sont compilés certains de ses plus grands succès ainsi que beaucoup d'autres titres interprétés par Brigitte Bardot, Juliette Gréco, Régine, Françoise Hardy, Alain Chamfort, France Gall…


Contours d'une personnalité complexe
Côté librairie, c'est l'avalanche ! Rééditions ou premiers tirages, les biographies, témoignages ou évocations se ramassent à la pelle. Si Gainsbourg (Albin Michel), l'opus écrit en 1992 par Gilles Verlant fait toujours figure de référence, il faut désormais lui adjoindre Tout Gainsbourg (Jungle Doc), la somme rédigée par Bertrand Dicale. Ce spécialiste de la chanson française dresse un inventaire encyclopédique de l'œuvre gainsbourienne (chansons, écrits, films, pubs…) à travers laquelle se dessine les contours d'une personnalité complexe, à facettes. Certes l'ouvrage de plus de mille pages ne se lit pas comme un roman, mais son - impressionnante - érudition assortie d'une foule de détails et d'anecdotes, le rendent indispensable à tous les amateurs. A signaler également Serge Gainsbourg, le génie sinon rien (Ed. Textuel) de Christophe Marchand-Kriss. Derrière ce titre un peu ronflant, une suite de textes vifs, concis et bien écrits, servis par une belle iconographie, abordent le personnage en mêlant habilement le contexte historique à l'approche thématique. Un beau livre à picorer.

Enfin, au-delà des gloses et des études, rien ne vaut un retour au texte original. Pour cela, deux ouvrages : Mon propre rôle qui réunit les paroles de ses chansons, des aphorismes et des inédits qui vient d'être réédités en format poche (Folio) et Les Manuscrits de Serge Gainsbourg chez Textuel. Cinq cents pages de textes, de lettres et autres documents autographes, compilés et présentés par Laurent Balandras, de très beaux fac-similés qui permettent au grès des pattes de mouche, des ratures et des annotations du maître, de saisir son questionnement, ses obsessions et la genèse de certaines de ses plus belles chansons. Emouvant et précieux.



Source : telerama.fr


 
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