En 1964, Mao Zedong, exprimant son soutien à la lutte du peuple panaméen contre l’impérialisme américain, prononçait les paroles suivantes, qui semblent étonnamment prophétiques, au vu de l’actuelle évolution du monde :
« En n’ayant de respect pour rien nulle part, l’impérialisme américain s’est fait l’ennemi de la population mondiale et n’a cessé de s’isoler chaque jour un peu plus. Ceux qui refusent l’asservissement ne se laisseront jamais intimider par les bombes A ou H aux mains de l’impérialisme américain. La vague de colère du peuple mondial à l’égard des agresseurs américains est irrésistible. Sa lutte contre l’impérialisme américain et ses laquais va à coup sûr remporter de plus grandes victoires encore. »
Habitués comme le sont la plupart des gens à penser métaphysiquement, ils ne voient dans l’impérialisme américain qu’un ennemi invincible disposant de la plus forte armée du monde, d’un arsenal de loin sans rival, d’une prospérité inouïe et d’une puissance illimitée reposant sur sa capacité à extraire les richesses de chaque pays du monde ou presque. Sur le plan historique et dialectique, toutefois, l’impérialisme américain est engagé dans un processus de déclin qui aboutira en fin de compte à sa chute, aussi sûrement que le tout-puissant Empire romain a connu lui aussi la sienne. Les décombres laissés par ce déclin ne seront pas évacués sans les énergiques efforts de l’équipe de démolition, c’est-à-dire les luttes victorieuses de la population écrasée et opprimée de la planète et, ce qui est plus important encore, la nouvelle société, libérée de l’exploitation et de l’oppression, ne pourra se construire sans d’autres luttes victorieuses menées sous la direction de partis communistes efficaces. Néanmoins, il devient de plus en plus évident que le processus de déclin s’accélère et que de petits pays peuvent espérer être en mesure de résister efficacement à l’exploitation à outrance de leur économie et à l’oppression de leur peuple par l’impérialisme américain. Et, bien sûr, puisque divers pays seront capables de résister à cette exploitation à outrance, le processus de déclin de l’impérialisme prédateur n’ira qu’en s’accentuant de plus en plus.
Dans un marché mondial en permanent rétrécissement (ceux que l’impérialisme a appauvris peuvent acheter de moins en moins), toutes les puissances impérialistes désespèrent d’accroître leurs profits, même s’ils sont drainés par les moyens mêmes utilisés pour sauvegarder leur domination et, en particulier, par la guerre. La guerre en Irak, grâce à la magnifique résistance du peuple irakien, coûte des sommes colossales auxquelles il convient d’ajouter le coût non négligeable des efforts en vue de poursuivre l’occupation de l’Afghanistan. Il en résulte que le déficit budgétaire américain, déjà très élevé, a désormais atteint des niveaux qualifiés d’effrayants. Surtout que, dans la mesure où les États-Unis ont besoin d’étendre leurs aventures militaires, par exemple, en Iran, en Syrie, au Venezuela – ce qui constitue leur seule façon de maintenir leur domination économique sur la planète –, opter pour cette démarche exposerait leur économie – en même temps que leurs armées – au risque grandissant d’un effondrement général. Mais si les États-Unis ne s’engagent pas dans la guerre, ces pays auront toute liberté de prendre des mesures visant à contrer l’exploitation de leur économie par l’impérialisme américain.
L’exploitation à outrance de l’Amérique latine
Nous avons déjà mentionné les démarches en ce sens de l’Iran, au grand dam des États-Unis. Tout aussi importantes, cependant, sont les initiatives lancées par le Venezuela, en partenariat avec Cuba, dans « l’arrière-cour » des États-Unis, autrement dit l’Amérique latine, dont la majeure partie est endettée jusqu’au cou vis-à-vis des banques impérialistes afin de financer un développement qui rendrait ses produits agricoles et ses matières premières extrêmement compétitifs sur le marché mondial. Des anticipations sur le remboursement des salaires ont laissé supposer que les prix resteraient stables, de sorte que ces pays se seraient enrichis grâce au fait d’avoir été en mesure de vendre infiniment plus sur le marché mondial. Ce qui s’est passé, toutefois, c’est que les prix des produits agricoles ont eu tendance à dégringoler suite à l’augmentation des livraisons, alors que les pays dont la productivité dans les secteurs concernés était retombée en deçà de la norme mondiale – comme les États-Unis, avec leur industrie textile et leur agriculture, le Japon avec ses rizières et l’Europe avec son agriculture en général – ont pris des mesures protectionnistes afin d’éviter que leurs propres producteurs soient mis hors circuit. La conséquence de tout cela a été que les producteurs performants du Brésil et de l’Argentine, par exemple, ont été incapables de s’agrandir, alors que les prix avaient dégringolé, les laissant avec d’importantes dettes à rembourser à l’impérialisme. Pleinement conscientes de la richesse massive engendrée par les pays de la région, les masses populaires de ces pays se sont de plus en plus agitées à travers tout le continent en assistant à la poursuite du processus de détérioration de leur niveau de vie, alors que celui-ci aurait dû s’améliorer. L’Argentine produit trente fois la quantité de nourriture nécessaire pour subvenir plus que convenablement aux besoins de sa propre population et, pourtant, ses pauvres crèvent littéralement de faim et il y a cinq ans d’ici, sa classe moyenne a vu ses économies complètement balayées. Le Venezuela, un producteur de pétrole de tout premier ordre, était la patrie de millions de travailleurs et de paysans frappés par la pauvreté, sans le moindre accès aux soins de santé ou à l’éducation. Avant l’élection de Hugo Chavez à la présidence, 85 pour 100 de la population du Venezuela, malgré les richesses pétrolières, vivait en dessous du seuil de pauvreté. L’incapacité de la Colombie à pourvoir aux besoins élémentaires de ses masses, a donné naissance à un vigoureux mouvement révolutionnaire et la même chose a eu lieu au Pérou, bien que ce dernier mouvement ait connu nombre de déboires, depuis la capture de son dirigeant. Il y a une trentaine d’années, les aspirations des peuples chilien et argentin ont été noyées dans le sang sous les ordres de l’impérialisme américain, puisque les mouvements progressistes de ces deux pays ont été soumis aux assassinats en masse de leurs militants, afin d’éliminer la menace qu’ils représentaient pour le pillage par l’impérialisme américain de leurs pays respectifs. Tant l’Équateur que la Bolivie ont donné naissance à des mouvements massifs de protestation contre le pillage impérialiste de leurs ressources nationales et, avec Evo Morales, le dirigeant paysan, la Bolivie vient d’élire un président qui a fait campagne en s’appuyant sur une plate-forme anti-impérialiste. Le peuple uruguayen, dont un tiers avait été maintenu sous le seuil de pauvreté dans un pays que l’on considérait comme la Suisse de l’Amérique latine, et après avoir été affaibli à mort par la stagnation économique et les méthodes fascistes utilisées pour préserver ce pourrissement (l’Uruguay avait un nombre considérable de prisonniers politiques et plus de la moitié de sa population a subi un jour ou l’autre des interrogatoires et/ou des tortures), a élu un président qui penche lui aussi à gauche, le Dr Tabare Vasquez. Au Chili aussi, les gens se sont servis des élections pour exprimer leur désir de réformes sociales en faveur des pauvres et ils ont voté pour ceux qui leur ont promis les mesures économiques censées arriver à ces résultats.
Dans le passé, on avait souvent eu l’impression que l’Amérique du Sud ne pourrait rien faire pour résister à son exploitation à outrance. Des mouvements de résistance étaient éradiqués via l’assassinat de leurs militants, les gouvernements qui résistaient aux exigences impérialistes étaient remplacés à la faveur de coups d’État inspirés par les États-Unis et l’alternative consistant à ne pas accepter les termes impérialistes désavantageux sur le plan des affaires aurait tout simplement été de ne plus pouvoir faire de commerce du tout ! Il ne semblait y avoir d’autre choix que celui de se soumettre.
Tout cela a changé, cependant, suite à l’affaiblissement de l’impérialisme américain de plusieurs manières différentes.
La guerre affaiblit l’impérialisme
Cela apparaît de la façon la plus évidente dans l’incapacité de l’impérialisme à soumettre l’Irak, en dépit de la plus horrible et haineuse des guerres qu’il ait jamais menées – allant jusqu’à échouer dans son principal objectif, qui était de s’assurer le contrôle d’une réserve majeure du pétrole arabe, contrôle qui lui aurait assuré un important moyen de pression sur toutes les économies avancées de la planète, toutes tributaires du pétrole. Cet échec a encouragé ceux qui aspiraient à l’indépendance à se dresser contre les menaces de guerre impérialistes, puisque, d’une part, l’impérialisme américain allait considérer ce genre de guerre comme étant très pénible sur le plan financier et militaire, ce qui pouvait suffire à l’en détourner, mais, même s’il décidait d’agir autrement, l’héroïsme du peuple irakien en inspire de toute façon d’autres au point de considérer qu’eux aussi peuvent sortir vainqueurs de la puissance militaire de Señor Peligro (« Dangerman », l’homme du danger, comme Bush a été surnommé par le président Chavez du Venezuela). « ‘Si le maître [Bush] s’acharne au point de nous envahir, il va se trouver plongé dans une guerre de cent ans’, a déclaré M. Chavez (…). Derrière M. Chavez (…), on pouvait voir un énorme portrait de Guevara. En face de lui, 25 000 personnes et drapeaux disant à Bush : ‘C’est VOUS, le terroriste !’ et le comparant à Hitler en raison de sa politique en Irak. » (Phil Davison, « Des manifestants aux prises avec la police de Buenos Aires au cours de la visite en Argentine du président Bush », The Independent, dimanche 6 novembre 2005.)
La crise économique affaiblit l’impérialisme
La seconde cause d’affaiblissement de l’impérialisme est la crise générale du capitalisme qui pousse toutes les puissances impérialistes au désespoir et cause des frictions entre elles puisque chacune tente d’alléger ses problèmes économiques aux dépens des autres. Les contradictions entre les puissances impérialistes permettent jusqu’à certain point aux économies émergeantes d’être à même de dresser les impérialistes les uns contre les autres afin d’obtenir des transactions plus avantageuses.
L’apparition de nouveaux marchés puissants
La troisième cause réside dans l’apparition d’acteurs majeurs sur le marché mondial – des économies gigantesques que l’impérialisme américain est incapable de contrôler, et particulièrement la Chine. Celle-ci propose aux pays opprimés par l’impérialisme un marché alternatif pour leurs ventes et achats, ce qui rend beaucoup plus difficile pour l’impérialisme américain de les tenir à sa merci en les menaçant de boycott commercial. Il convient de faire remarquer que l’Amérique latine trouve en Chine un marché fin prêt à accueillir ses produits. La Chine, par exemple, importe du Brésil des quantités massives de produits dérivés du soja. Le Venezuela a négocié avec la Colombie pour construire un oléoduc vers sa côte pacifique. « Cela pourrait accroître les exportations pétrolières de Caracas en direction de la Chine et aux dépens des États-Unis, qui dépendent du Venezuela pour 15 % environ de leur pétrole étranger. » (voir Simon Tisdall, « Chavez, celui qui harcèle Bush », The Guardian, 25 novembre 2005.) Le Venezuela est également en pourparlers avec la Russie (pour l’acquisition d’armes) et l’Iran (pour l’acquisition de tracteurs) et, là où le Venezuela ouvre la voie, d’autres pays latino-américains suivront à coup sûr.
La montée soudaine de la résistance des dépossédés
Tout aussi importante, cependant, est l’intensification de la résistance des masses des peuples écrasés dans la totalité des pays opprimés, qui n’imputent plus leur paupérisation à un manque de démocratie ou à la corruption de leur gouvernement, mais en sont venus à se rendre compte que leurs malheurs étaient dus avant tout au pillage impérialiste – quoique la corruption du gouvernement et l’absence de démocratie soient fréquemment utilisées pour contribuer à ce pillage. Comme le fait remarquer The Independent du 6 novembre 2005 (Phil Davison, « Bush rabroué par la main de Dieu ») : « Tous ceux qui ont passé quelque temps en Amérique latine récemment sauront qu’aux yeux des Latino-Américains, M. Bush est le président américain le moins populaire de toute l’histoire. Cinq pays latino-américains ont élu des gouvernements de gauche ou centristes, depuis qu’il occupe ses fonctions. Depuis les peuples indigènes aux classes moyennes, voir parmi l’élite, les Latino-Américains cherchent de plus en plus, non pas le rêve américain, mais le rêve latino-américain. Ils ont perdu toutes leurs illusions dans ce qu’hier Maradona a appelé ‘l’Empire américain’. » Quand Bush s’est rendu en Argentine en novembre, à l’occasion du Sommet des Amériques, il a été accueilli par des manifestations hostiles partout où il est passé, puisque les gens l’identifient clairement à l’impérialisme. Le Sunday Times du 6 novembre 2005 a donc écrit : « Les deux journées de réunion dans la cité balnéaire argentine de Mar del Plata ont été gâchées par des violences qui ont vu plus d’un millier de jeunes masqués se déchaîner dans les rues, faisant voler en éclats des vitrines de magasins, balançant des cocktails Molotov et se heurtant aux forces de police au nom de la défaite de ‘l’impérialisme yankee’. » Et ce n’était qu’une des nombreuses manifestations qui ont eu lieu partout en Amérique latine.
Les initiatives du Venezuela et de Cuba
C’est dans ce contexte que nous devrions apprécier les efforts du Venezuela et de Cuba en vue de concrétiser le rêve de Simon Bolivar : une Amérique latine unie qui serait capable de tourner le dos à l’impérialisme. L’une des principales raisons pour lesquelles les États-Unis et la Grande-Bretagne sont partis en guerre contre l’Irak résidait dans leur intention de monopoliser l’approvisionnement mondial en pétrole, un monopole qui serait suspendu comme une épée de Damoclès au-dessus de n’importe quel pays tentant de garer son économie des mains de voleur de l’impérialisme. Au mieux des intérêts de l’indépendance de l’Amérique latine, le gouvernement vénézuélien dirigé par Chavez entend utiliser les substantielles réserves pétrolières du Venezuela pour briser le monopole impérialiste. En effet, le Venezuela fournit du pétrole à des prix écrasés à ses alliés latino-américains dans l’intention de les encourager à se libérer de l’étreinte impérialiste.
Tout récemment, le Venezuela a dirigé avec succès le rejet par l’Amérique latine des propositions américaines en faveur de la Zone libre-échangiste des Amériques (FTAA), qui n’est autre qu’une tentative importante des États-Unis en vue d’approfondir leur pénétration du marché latino-américain et de démanteler ce qui reste des activités économiques protégées dans leur souci d’obtenir des échanges à très bon compte. La principale force motrice à avoir persuadé les pays d’Amérique latine de s’engager avait été la crainte de perdre le peu qu’ils avaient s’ils n’obéissaient pas aux exigences de l’impérialisme américain. Mais, maintenant, avant d’accepter de signer la FTAA, le Brésil et l’Argentine se sont enhardis à réclamer la fin des pratiques restrictives des États-Unis, qui ont jusqu’à présent empêché l’accès des produits agricoles de ces deux pays au marché américain. Le gouvernement américain n’a pas voulu faire de concession sur ce point et il en est résulté que, lors du Sommet des Amériques qui s’est tenu en novembre à Mar del Plata, en Argentine, et qui visait à promouvoir l’instauration de la FTAA, les pourparlers ont débouché sur une impasse. Il a fallu remiser le projet FTAA sur feu doux pour un temps indéterminé puisque, sans les deux principales économies de la zone, il n’a que peu de valeur. Et il n’y a pas que cela. « À Washington », explique le Financial Times, « les entretiens entre les États-Unis et la Colombie, l’Équateur et le Pérou en vue de dégager des accords libre-échangistes se heurtent à des obstacles », alors que « les négociations avec la Colombie, l’une des principales alliées des États-Unis dans la région, en sont même au point mort ». (Andy Webb-Vidal, « Les fermiers du Venezuela se méfient de l’issue des pourparlers du Mercosur », The Financial Times, 23 novembre 2005.)
Le Venezuela, en collaboration étroite avec Cuba, montre également la voie en combattant la pauvreté de masse. Il a insisté pour que l’impérialisme paie un meilleur prix pour le pétrole qu’il extrait du Venezuela. Il a mené une réforme agraire qui a redistribué les terres sous-exploitées aux paysans, les reprenant aux latifundia de plus de 20 000 hectares au profit de ceux qui travaillent la terre. Des projets ont également été lancés avec grand succès pour amener l’éducation et les soins de santé aux masses vénézuéliennes, de même que des coopératives de travailleurs destinées à reprendre l’industrie des mains des compradores et à réduire le pouvoir de base de ces derniers. Richard Lapper écrit ce qui suit dans le Financial Times du 3 novembre dernier : « Vingt mille médecins et paramédicaux – environ un quart de l’establishment médical cubain – pourvoient en personnel toutes les cliniques du Venezuela. Cuba est impliqué dans l’administration du Mercal, un programme alimentaire subventionné. (…) Si l’Amérique latine veut se libérer du carcan impérialiste, des mesures comme celles-ci sont absolument essentielles puisqu’elles seules peuvent assurer le soutien loyal des masses des gens écrasés qui ont le plus souffert de l’exploitation outrancière et impitoyable de leur pays par l’impérialisme. En effet, lors des élections qui ont eu lieu dernièrement au Venezuela, à l’issue du premier mandat de Chavez, sa popularité parmi les masses était si débordante que ses opposants ont déclaré ne pas désirer participer à ces élections. En ce qui les concernait, des élections auxquelles les masses populaires avaient été mobilisées pour voter sur base des bénéfices acquis durant la présidence de Chavez, étaient des élections ‘arrangées’. »
Ce que Chavez tente de concrétiser en Amérique latine, maintenant que le pire ennemi de l’humanité tout entière, l’impérialisme américain, a l’attention attirée ailleurs, c’est la vision du héros national de la lutte indépendantiste cubaine contre l’Espagne au 19e siècle, José Marti. Chavez s’inspire de cette tradition révolutionnaire pour proposer La Alternativa Bolivariana para las Americas (l’ALBA, l’Alternative bolivienne pour les Amériques), une zone libre-échangiste de pays latino-américains d’où seraient exclus les États-Unis et qui ferait la promotion de la coopération économique, financière, commerciale et échangiste, tout en cherchant à mettre sur pied la plus large solidarité possible, entre les peuples de l’Amérique latine et des Caraïbes et qui chercherait en même temps à éliminer les inégalités sociales, qui se chargerait de la promotion de la qualité de vie des masses populaires et encouragerait ces dernières à une participation leur permettant enfin de prendre en main leur propre sort.
La Bolivie
Pendant ce temps, les masses boliviennes se sont soulevées à diverses reprises afin de protester contre le pillage de leurs réserves en gaz naturel – les secondes de l’Amérique latine – par les multinationales impérialistes et contre les prix astronomiques de l’eau que leur imposaient les compagnies impérialistes propriétaires des services de l’eau en Bolivie même. Les masses boliviennes ont renversé deux gouvernements qu’elles considéraient comme trop complaisants vis-à-vis des intérêts impérialistes. Evo Morales a remporté les élections parce qu’il entend aller plus loin encore que ses opposants, qui ont déjà augmenté les taxes sur la production de gaz, les faisant passer de 18 à 50 % pour 100, et ce, sous la pression des masses. Dans un même temps, Morales a également exprimé le vœu de nationaliser l’industrie gazière, à la grande consternation des multinationales (parmi lesquelles Repsol, British Gas et Total) qui, actuellement, la soumettent à un pillage en règle. En tant que président, on peut s’attendre à ce qu’il se mue rapidement en partisan enthousiaste des initiatives cubano-vénézuéliennes.
Conclusion
Il y a certainement des contradictions entre ceux qui s’opposent au pillage de leur pays par les impérialistes, pillage que les États-Unis vont tenter d’exploiter au maximum afin de déjouer la création d’un bloc commercial latino-américain stable, dont ils sont exclus ou, du moins, auquel ils sont incapables d’imposer leurs conditions commerciales reposant sur une inégalité on ne peut plus flagrante. Bien des sections des bourgeoisies nationales de ces pays sont angoissées à l’idée de partager leur richesse avec les pauvres et la plupart d’entre elles sont également effrayées de ce que pourrait leur infliger l’impérialisme américain. Toutefois, les pauvres opprimés de la région ont repris avec un grand enthousiasme les initiatives bolivariennes, ils se sont vu offrir de l’espoir en remplacement de leurs incessantes souffrances et de leur désespoir permanent et ils continueront à inciter leurs gouvernements à suivre la voie de la rupture libératrice avec l’impérialisme et de l’unité au profit du mieux-être de tous. Les peuples latino-américains ont prouvé récemment, tant en Argentine qu’en Bolivie, qu’ils étaient plus que capables de forcer leurs gouvernements à démissionner s’ils n’assumaient pas les obligations qu’ils avaient acceptées. L’impérialisme continue à radicaliser les exploités à la fois par sa détermination à vouloir encore accroître une exploitation déjà suffisamment outrancière et par la bestialité incroyable de ses agressions militaires. Par conséquent, l’un dans l’autre, il est probable qu’en dépit des sales trucs habituels ou pas que l’impérialisme américain est susceptible d’utiliser dans sa tentative de garder à portée de main cette poule aux œufs d’or qu’est l’Amérique latine, les peuples de cette même Amérique latine et leurs alliés dans les Caraïbes vont être à même d’instaurer des mesures permanentes en vue de se protéger de l’exploitation à outrance. Nous ne pouvons que leur souhaiter un franc succès dans leurs tentatives.
Harpal Brar
http://www.lalkar.org
Février 2006