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Le Premier ministre israélien continue d’apporter son soutien inconditionnel au président brésilien, très critiqué pour sa gestion des incendies en Amazonie.

Le président Jair Bolsonaro doit se sentir bien seul depuis que des incendies géants ravagent l’Amazonie et suscitent une vague d’indignation internationale. Il a été dénoncé pour ses « mensonges » en plein G7 par Emmanuel Macron, le 23 août, et sa gestion irresponsable, pour ne pas dire complice, de la crise, a été critiquée par de nombreux dirigeants occidentaux. Même Donald Trump n’a pas pu cacher sa préoccupation face à l’ampleur d’une telle catastrophe écologique. Mais Bolsonaro peut se consoler avec le soutien indéfectible que continue de lui apporter Benjamin Nétanyahou: le Premier ministre israélien a « salué les efforts du Brésil pour lutter contre les incendies en Amazonie », le 25 août, offrant à cette occasion l’aide d’Israël, aussitôt acceptée par Brasilia. Bolsonaro refuse en revanche, le lendemain, l’aide substantielle qui lui est proposée par le G7, exigeant en préalable le « retrait des insultes » (sic) de son homologue français.

Un puissant lobby évangélique
Nétanyahou avait déjà été l’un des rares dirigeants étrangers à assister, le 1er janvier dernier, à l’investiture à Brasilia du président Bolsonaro. Il y avait retrouvé Viktor Orban, le Premier ministre hongrois, allié de longue date de Nétanyahou contre les supposés « diktats » de l’Union européenne, ainsi que contre le philanthrope américain George Soros. Le président Trump, pourtant très attendu par Bolsonaro, qui se présente comme son meilleur disciple sur le continent américain, avait choisi de se faire représenter par son secrétaire d’Etat Mike Pompeo. Nétanyahou était demeuré cinq longs jours au Brésil pour cette première visite officielle d’un chef de gouvernement israélien dans le pays. La famille Bolsonaro, dont les fils s’affichent volontiers avec des T-shirts du Mossad et de l’armée israélienne, lui avait organisé, à Rio comme à Brasilia, une véritable tournée de « pop star ».

Nétanyahou avait alors tenu à rencontrer au Brésil des personnalités du puissant courant évangélique, socle de la victoire de Bolsonaro: « Nous n’avons pas de meilleur ami au monde que la communauté évangélique et la communauté évangélique n’a pas de meilleur ami au monde qu’Israël ». Cette profession de foi couronnait le basculement stratégique de Nétanyahou, préférant miser, aux Etats-Unis, au Brésil et au-delà, sur la vague fondamentaliste de l’évangélisme plutôt que sur une diaspora juive à la fois trop critique et trop divisée à ses yeux. Le Premier ministre israélien avait, dans cet esprit, balayé les inquiétudes de ses coreligionnaires brésiliens face à la poussée historique de l’extrême-droite.

Un soutien payé en retour
Bolsonaro n’a pas tardé à rendre la pareille à Nétanyahou en effectuant, à partir du 31 mars dernier, une « visite d’Etat » en Israël. Ce déplacement officiel avait toutes les allures d’un soutien électoral au Premier ministre israélien, peu avant les législatives du 9 avril. Nétanyahou, ayant épuisé les figures rhétoriques sur « l’amitié », puis « l’alliance » entre Israël et le Brésil, a alors célébré la « nouvelle fraternité » entre les deux pays. Bolsonaro a pour sa part affirmé « sans aucun doute » la filiation « de gauche » du nazisme, en écho des manoeuvres répétées de son hôte pour réécrire l’histoire de la Shoah. Le président brésilien n’a cependant pas tenu sa promesse électorale de déplacer l’ambassade de son pays en Israël depuis Tel-Aviv vers Jérusalem, à l’image du précédent édicté par Trump dès mai 2018. Il est vrai qu’un tel engagement, porté par le courant évangélique, est combattu par un autre soutien crucial de Bolsonaro, les pontes de l’agro-alimentaire (le Brésil, premier exportateur mondial de viande halal, serait particulièrement vulnérable à d’éventuelles rétorsions arabes).

Malgré cette déconvenue relative, Nétanyahou a donc choisi d’afficher sa solidarité avec son allié Bolsonaro durant la crise des incendies en Amazonie. Le président brésilien demeure cohérent avec sa déclaration de janvier dernier, à Rio aux côtés de Nétanyahou, lorsqu’il avait prôné un rapprochement stratégique avec Israël « et les autres pays, tels les Etats-Unis, à l’idéologie proche de la nôtre ». Entre les deux dirigeants, il ne s’agit dès lors plus d’un partenariat de circonstance, mais d’une alliance ancrée dans une idéologie partagée. Les récents débordements anti-français du chef de l’Etat brésilien ont révélé une des parts les plus sombres de cette idéologie. Quant à Nétanyahou, engagé dans une nouvelle campagne électorale, du fait de sa décision de dissoudre la Knesset élue en avril, il réserve pour l’heure ses propres débordements à ses opposants israéliens.

Le scrutin du 17 septembre prochain en Israël, au-delà de ses enjeux complexes pour le pays et le Moyen-Orient, se double désormais d’une dimension internationale inédite: Bolsonaro va-t-il conserver un de ses alliés les plus solides, alors que l’isolement international du Brésil dans la crise amazonienne est sans précédent?


 
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