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Qu’est-ce que le « conspirationnisme » ? C’est un mode de pensée qui tend à expliquer les situations et événements négatifs par des complots. On connaît cette idée sous une autre expression : la « théorie du complot ». Dans cette vidéo, Charles Robin développe plusieurs arguments ayant pour but de montrer les limites, les paradoxes, voire les absurdités de ce concept.



Avec le développement d'internet au début des années 2000, ont commencé à paraître des articles et des vidéos se proposant de mettre en doute de manière plus ou moins argumentée, la version officielle de certains événements de l'histoire récente. L'exemple le plus marquant étant évidemment les doutes émises à propos des attentats du 11 septembre 2001, sur lesquels planent encore aujourd'hui de nombreuses questions tant sur le déroulement exact des faits que sur les conditions de l'enquête qui s'ensuivit. Des documentaires mis en ligne sur internet en 2005, ont largement contribué à susciter l'intérêt, et le questionnement du public au point que certaines personnalités du showbiz comme Jean-Marie Bigard ou Mathieu Kassovitz, pour ce qui concerne la France, se sont même invités dans le débat public pour faire état de leur trouble quant à certains éléments de la version officielle des événements. 

On sait qu'une telle attitude, celle qui consiste à envisager une autre version des faits que celle qui nous est donnée par les gouvernements, et ensuite par les médias, comporte de grands risques, ce qui soit dit entre parenthèses nous permet déjà de remarquer que ce n'est manifestement pas par intérêt de carrière ou par recherche de popularité, que de telles voix discordantes s'élèvent dans le monde médiatique. Le risque c'est celui de la marginalisation et d'une mise à l'écart du débat, marginalisation qui tient tout entière dans le non forgé spécialement pour désigner cette attitude de remise en cause, celui de conspirationnisme. 

Dans cette vidéo, je souhaiterais exposer un certain nombre d'arguments visant à montrer que ce terme, celui de conspirationnisme, est lui-même porteur d'ambiguïté qui en font nous le verrons un concept hautement problématiques, évidemment chacun sera libre de former son jugement à partir des éléments que je vais énoncer. Mon propos n'ayant pas vocation à créer de controverse, j'annonce que je me tiendrais en retrait de toute provocation et de toute attaque aussi bien dans cette vidéo que dans mes éventuelles réponses aux commentaires qu'elle suscitera. 

Tout d'abord que désigne le mot de conspirationnisme, une définition donnée par Wikipédia, et je cite un mode de pensée tendant à expliquer les situations et événements négatifs par des complots, je m'appuierai sur cette définition. Une autre expression souvent employé pour parler du conspirationnisme et celle de théories du complot, nous emploierons indifféremment ces deux expressions dans cette vidéo. Le premier problème qui surgit avec le mot de conspirationnisme concerne le champ de signification qu'il recouvre, en effet ce mois a pour effet d'effacer toute distinction, entre une attitude qui serait seulement sceptiques ou distancié à l'égard de la version officielle d'un événement, une attitude de prudence intellectuelle en quelque sorte, une attitude qui consisterait à l'autre bout du spectre, a nié purement et simplement la réalité de l'événement en question, pour affirmer à sa place l'existence d'une élite de dirigeant au culte, dont tous les événements ou en tout cas les plus déterminants, serait l'œuvre direct. On se trouve donc là avec un premier problème, celui d'un terme qui désigne non pas un champ de réalité homogène et délimiter, mais un éventail de comportements pouvant aller du simple doute, or le doute me semble-t-il, ne devrait jamais être interdit à l'affirmation péremptoire et définitive d'une conspiration mondiale. Ce problème est d'autant plus gênant que l'anti conspirationnisme prétend justement, dénoncé le manque de rigueur et de rationalité des théoriciens du complot, mais à recourt dans le même temps, un terme qui entretient lui-même un amalgame grossier une confusion des genres. 

J'insiste là-dessus, comment regrouper sous un concept unique d'un côté la volonté de vérifier ou de comparer les sources, attitude de prudence, et d'un autre côté l'affirmation d'une chose sans aucun élément de preuve. Comment regrouper sous le même terme celui qui cherche et celui qui dit qu'il n'y a pas besoin de chercher. Pour reprendre le cas du 11 septembre, comment mettre sur le même plan celui qui s'étonne du fait que les médias aient quasiment jamais mentionné l'effondrement de la tour numéro 7 du World Trade Center, quelques heures après l'effondrement des tours numéro 1 et numéro 2 et qui s'en étonne d'autant plus que le bâtiment de 47 étages s'est écroulé à la vitesse de la chute libre ? ce que des ingénieurs en bâtiment reconnaissent comme étant la marque d'une démolition contrôlée. Comment mettre cette interrogation en équivalence avec l'affirmation selon laquelle par exemple, les attentats du 11 septembre seraient le fait d'un gouvernement mondial, lui-même aux ordres d'une congrégation d'extraterrestres. C’est une question sérieuse que je pose est que l'on ne peut pas évacuer sans arguments solides ; Je répète que nous sommes ici dans le cas de deux attitudes extrêmement hétérogène quant à leur nature, quant à leur contenu, et quant à leurs modalités d'expression et que dans un cas, on pose une question, tandis que dans l'autre, on répond, et on répond sans apporter de preuves, s'interroger relève-t-il déjà du conspirationnisme. Le mot conspirationnisme possède évidemment une charge symbolique très forte, il faut toujours garder à l'esprit lorsqu'on analyse le sens et la portée d'un concept, nous y reviendrons dans quelques instants, il s'agit d'un néologisme qui a été forgé pour rendre compte de la tendance à remettre en cause, de manière systématique ou circonstancielle, la version officielle un événement. Mais l'expression même de version officielle pourrait nous occuper longtemps puisque dans de nombreux cas, la version officiel désigne davantage une sorte de consensus médiatique qui laisse malgré tout, une classe aux nuances et aux zones d'ombre, la meilleure preuve en est que tout le monde est d'accord pour dire que si l'on veut se forger un avis fiable, il importe de consulter différentes sources d'information, différents journaux, différents sites internet, et ce afin de ne pas épouser aveuglément la position défendue par un seul organe d'information, toujours susceptibles de manquer d'objectivité, voire d'être partisan. On nous incitera ainsi à comparer les sources pour faire le tri, entre les faits et leurs interprétations. On peut ainsi dire que la version officielle et ceux qui restent lorsqu'on a passé toutes les sources au filtre de la comparaison. Or, le seul fait que nous soyons encouragés à consulter plusieurs sources, ne montre-t-il pas qu'il existe toujours un risque, plus ou moins élevé, que la version des faits proposée, contiennent des erreurs, des omissions, des oublis, voire des mensonges. Le seul fait de ne pas prendre un article de presse pour argent comptant, quand bien émanerait d'une source réputée fiable, est-ce déjà du conspirationnisme ? non c'est l'attitude réglementaire pour un journaliste qui fait correctement son travail, pour un scientifique qui cherche à comprendre et expliquer un phénomène, tout simplement pour un citoyen conscient et soucieux de véracité. On se retrouve donc avec le terme de conspirationnisme, à mettre sur le même plan, une investigation nourrie par le doute méthodique à l'égard des faits exposés, ce qui est pourtant le fondement même de la démarche scientifique, telle qu’elle a pu être définis notamment par Descartes au XVIIe siècle, et un comportement de réfutation systématique d'éléments jugés , a priori, sans le moindre commencement de preuve matérielle. Le mot conspirationnisme a donc pour effet objectif, de jeter le discrédit, sur toute une partie de la recherche seulement intéressée à trier le FAUX du VRAI, de consolider un amalgame structurel entre une recherche libre et à trouble paranoïaque, car c'est bien le paranoïa que sont soupçonnés tous ceux qui reçoivent de manière plus ou moins directe on leur reproche de conspirationnisme. En tant qu’attitude, le conspirationnisme ne désigne pas seulement un ensemble de thèses, ou d'opinion sur certains événements, par exemple sur le 11 septembre, la guerre d'Irak, mais aussi l'assassinat de Kennedy, l’attaque de Pearl Harbour et d'autres encore, il désigne également le diagnostic psychiatrique qui explique l'adhésion supposée à ces théories, je mets des guillemets, c'est l'une des raisons pour lesquelles toute mise en doute des circonstances d'un événement reconnu de l'autorité publique, sera rapportée à un désordre psychologique, voire psychiatrique, et que de ce fait, la personne visée par l'accusation de conspirationnisme pour être jugé au choix avec indifférence, avec condescendance, ou avec violence. La psychiatrisation du débat fonctionnera ainsi à la fois comme une manière de dénoncer une attitude de suspicion jugé pathologique et de se soustraire à toute obligation d'opposer une contre argumentation. 

Je m'adresse ici à tous ceux qui font profession de dénoncer le conspirationnisme, notamment d'un point de vue scientifique, sociologique, psychologique ou autre, je leur pose cette question, en tant que scientifique, vous connaissez ce qu'on appelle en épistémologie le principe de réfutabilité, c'est à dire la règle qui veut énoncé peut être dit scientifique seulement si peut être réfutée, autrement dit, s'il offre les conditions de sa réfutation, il est souvent reproché aux tenants de la théorie du complot de se soustraire justement à cette règle scientifique de la réfutabilité, autrement dit, d'élaborer des constructions scénaristiques qui font que tout ce qui sera opposé à ces constructions sera vu comme une preuve supplémentaire du complot, et effectivement dans la paranoïa, on retrouve ce mécanisme psychique de reconstruction de la signification des choses. 

Ma question est, n'y at il pas au même titre dans le recours systématique à l'anathème théorie du complot pour toute réponse à des points de vue divergents, une attitude très anti scientifique, une attitude qui rend irréfutable votre diagnostic ? puisque si vous partez du principe que votre contradicteur et paranoïaque, tout ce qui pourra vous opposez ne sera qu'une preuve supplémentaire de sa paranoïa. Là encore, nous sommes dans un cas de raisonnement circulaire, il croit au complot, donc il est fou, et comme il est fou il croit au complot. Le mot conspirationnisme est d'abord en ce sens, un concept politique, son emploi ne sert pas les intérêts de la compréhension comme nous venons de le voir puisqu'il empêche toute la compréhension en créant des amalgames en psychiatrie dans le débat et en se soustrayant à l'obligation d'une contre argumentation lorsque des arguments sont apportées, et c'est parfois le cas. 

Ce concept sert d'abord les intérêts de ceux qui ont intérêt à disqualifier tout propos jugés hérétiques, et dire ça n'a rien de paranoïaque au contraire c'est même plutôt lucide je pense, et vous allez tout de suite comprendre pourquoi. Rappelez-vous la guerre d’Irak en 2003, à l'époque, des voix se sont élevées dans les médias on citera par exemple celle de José Bové pour dénoncer une intervention militaire qui lui paraissait, avoir, selon ses termes, une forte odeur de pétrole, les conspirationnistes, si on suit le raisonnement exposées précédemment, étaient donc ceux qui comme José Bové, mettaient en doute la motivation affichée par le gouvernement Bush d'intervenir en Irak pour libérer le peuple de la dictature sanglante de Saddam Hussein, intervention dite « Opération Liberté Irakienne », la postérité appréciera, l'épreuve était faible c'est VRAI pour ne pas dire quasi inexistante, mais comment prouver que les Etats-Unis intervenait bel et bien en Irak pour étendre leur emprise politique et économique au Moyen-Orient, à moins de pouvoir se transporter dans l'esprit des décisionnaires eux-mêmes, c'est donc sur une intuition qu'a germé le soupçon contre la guerre dite préventive d’Irak, intuition qui pouvaient naître à l'esprit de ceux qui connaissaient la longue tradition impérialiste des Etats-Unis, qu'ils connaissaient leur patriotisme militaire, qui percevaient la cohérence de cette intervention avec certains grands enjeux économiques et qui permettez-moi de dire sans aller plus loin, qu'il était permis de douter des motivations altruiste et humanitaire de cette guerre, ce n'est peut-être pas très scientifique sur le plan de l'analyse, puisque même si l'histoire est une science, c'est une science qui permet assez mal de prévoir mais sur le plan intuitif et pratique, le raisonnement tenait très largement la route. Qu'on se dise partisan ou opposant la théorie du complot, tout le monde acceptera, je pense, que la politique n'est pas la mise en œuvre d'un programme rationnel et objectif destiné à organiser le bonheur universel de l'humanité. La politique, ce sont des conflits et des stratégies, ce sont des traditions et des intérêts, ce sont des alliances et des changements d'alliances, à partir de là, dire que tout est complot ou présupposé que rien n’est complot, dans les deux cas, on est dans le déni du réel et là mes compétences s'arrêtent. 

Revenons à la guerre d’Irak, déjà à l'époque on a répondu que la théorie du complot, concernant la guerre en Irak, était une attitude injustifiable et irresponsable, d'autant plus irresponsable que la vie de millions d'irakiens étaient en jeu, puisque ce même gouvernement américain avait, explicitement, évoqué la menace de l'utilisation d'armes chimiques par Saddam Hussein, or que s'est-il passé, le 5 février 2003, Colin Powell, secrétaire d'état américain en charge du dossier irakien, prononce on fameux discours devant le Conseil de l’ONU, je vais vous lire un extrait de la page Wikipédia, je cite « les armes de destruction massive en Irak , le 5 février 2003,Colin Powell reçoit le discours rédigé par Lewis Libby, directeur du cabinet du vice-président Richard Cheney, en découvrant le contenu douteux du document, Colin Powell s'écrie, je ne vais pas dire cela c'est de la merde, cependant il passe quand même devant le Conseil de Sécurité des Nations Unies pour tenter de dévoiler les preuves des activités illicites du régime Bassiste, il fait défiler des dessins de camions présentés comme des prototypes de laboratoire mobile de recherche biologique sur la base de FAUX renseignements de kurdes Ball, ingénieur chimiste irakien à l'origine d'une des plus grandes supercheries de l'histoire du gouvernement, fait passer des photos satellites pour des usines d'armes chimiques et des bunkers et présente finalement un flacon de poudre blanche de l'anthrax. Durant la guerre d’Irak en mars 2003, l'inspecteur de l’ONU Hans Blinx dit qu'il n'y avait pas d'armes de destruction massive en Irak. Les inspections américaine menées pendant la guerre s'accordent pour dire que l’Irak avait abandonné son programme nucléaire chimique et biologique après 1991, bien que des résidus d'armes chimiques aient été retrouvés en revanche au nord de Bagdad, le dossier cité par Colin Powell, avait été fourni par l'administration de Tony Blair qui reconnaîtra le 7 février 2003, des gaffes dans le dossier, dès le 8 février, les journaux anglais identifient les vrais auteurs du rapport comme étant les services de communication de Dowding Streets et la pauvreté des sources utilisées par ces derniers, plagiat universitaire et source suspecte. Jane Harman, élu démocrate de Californie, souligne que la propagande des armes de destruction massive irakien est la plus grande manœuvre d'intoxication de tous les temps, un groupe d'anciens experts, de la CIA et du Département d'Etat, dénonce que les renseignements avaient déjà été faussés pour des raisons politiques mais jamais de façon aussi systématique pour tromper nos représentants élus afin d'autoriser une guerre. Paul Wolf witz, le numéro deux du Département de la Défense , a reconnu le mensonge d'Etat en avouant que nous sommes entendus sur un point at il précisé les armes de destruction massive, parce que c'était le seul argument sur lequel tout le monde pouvait tomber d'accord, Colin Powell exprimera deux ans plus tard son amertume, interrogé sur NBC, il explique que cette présentation, en grande partie fausse, fait tâche dans sa carrière. En 2011, Colin Powell demande et la CIA au Pentagone, des explications sur les fausses informations qui lui firent communiquées en 2003. Dans un entretien en 2013, Colin Powell déclare, au sujet des armes de destruction massive en Irak, que Saddam Hussein n'en possédait pas un gramme ». 

Nous avons donc typiquement à faire ici, un exemple de théories du complot qui s'est, au bout du compte, révélé exact. Attention, cela ne veut pas dire que tous ceux qui affirmaient que la guerre en Irak, était une entreprise de manipulation avait raison de le faire, certains avaient peut-être aucune connaissance sérieuse du dossier et croyaient au complot parce qu'ils avaient décidé d'y croire. préalablement à toute enquête, mais cela veut dire en revanche qu'il est tout aussi frauduleux et inconséquent de tourner en dérision ce genre d'hypothèse sur le simple fait qu'elle relèverait d'une tendance au conspirationnisme, une autre manière de le dire et quel rapport anti conspirationnisme entretient-il avec les faits, si les faits valident les hypothèses avancées par des conspirationnistes, les faits sont-ils en tort ou bien le mot conspirationnisme perte-il un peu de son efficience. 

C'est là, le point essentiel de cette vidéo dans la continuité de l'argument sur le principe de réfutabilité, si le concept de conspirationnisme est un concept impropre et non pertinents, c'est du fait qu'il dispense toute personne qui ait recours, à devoir se prononcer sur les faits. Quand je dis, par exemple, j'ai des doutes quant à la véracité des informations contenues dans le discours de Colin Powell à l’ONU, je n'attends pas que l'on me réponde que la paranoïa est un trouble mental manifesté par des difficultés relationnelles des troubles du comportement, et un sentiment de persécution pouvant aller jusqu'à un point d'irrationalité et de délire. 

Je ne vois aucune raison légitime de détourner la question vers un domaine médical, à moins d'obéir et un réflexe pavlovien ou un automatisme de pensée qu'il évacue vers l'irrationnel tout ce qui excède son champ d'acceptation, dans ce cas et pour jouer au même jeu, ce sont peut-être certains anti conspirationnistes primaires qui sont atteints d'un trouble mental qu'il a fait rejeter le principe même du doute sur des sujets sur lesquels il juge que le doute est proscrit, et douter c'est aussi bien la possibilité que ce que je pense puisse être faut que la possibilité que ce que l'autre pense puisse être VRAI, lorsqu'on pense avoir discrédité un discours, une position ou un argument du seul fait de son appartenance présupposé à la théorie du complot, et c'est là qu'on voit la grande perversité de ce terme, puisqu'il s'agit d'un gigantesque sac sémantique dans lequel il est possible de ranger à peu près tout ce qui contredit de près ou de loin la version officielle, comme le terme populisme avec lequel le conspirationnisme se marie très bien, permet de désigner à peu près toute remise en cause de la légitimité des dirigeants. Lorsqu'on pense disais-je, avoir discrédité une position du seul fait qu'elle relèverait d'une pensée conspirationniste, une pensée dont il faut encore établir les critères, on ne fait qu’adopter un positionnement dogmatique, autrement dit idéologique, c'est là que je souhaitais en venir, il est absurde, je dis bien absurde, d'utiliser un qualificatif comme celui de conspirationniste sans avoir effectué un minima, une vérification des éléments contestés par le conspirationniste en question, il est absurde et scientifiquement nul de forger un concept qui prétend décrire les mécanismes d'une pensée indépendamment de l'étude du bien-fondé de cette pensée. Pourquoi est-ce absurde parce que dans ce cas précis, on étudie un phénomène car on le considère à priori comme déviant, excentrique littéralement, voire pathologique en d'autres termes le conspirationnisme est intéressant parce qu'il nous met en présence de croyance et d'irrationalité, prenons un exemple, si je pense que la terre est ronde et qu'elle tourne autour du soleil, lui-même étoile fixe du système solaire, je ne fais qu'énoncer une assertion scientifique largement démontrée par l'observation. Dans ce cas, ma position sera conforme à la norme elle-même jugée conforme à la réalité et à la rationalité, ma position, la terre est ronde et tourne autour du soleil ne fera l'objet d'aucune étude sociologique ou psychologique visant à comprendre les mécanismes de ma pensée, maintenant si j'affirme que la terre est plate et immobile, je sors du sentier de la norme, donc de la réalité et de la rationalité. Je m’engage dans une position déviante, excentrique, qu'on pourra alors qualifier au choix de fantaisistes ou d' inquiétante, peu importe. Dans tous les cas, ma position va attirer la curiosité de ceux qui veulent comprendre pourquoi je pense de la manière dont je pense, qu'ils vont donc chercher à identifier les mécanismes à partir desquels ma croyance se met en place, ma position deviendra en ce moment-là, un sujet d'intérêt scientifique, c'est bien le but de la science, éclairer ce qui est obscur, comprendre ce qui est étrange, voire étranger, d'où cette question, comment prétendre expliquer les raisons qui font que certaines personnes pensent qu'elles pensent, doutent de ce qu’elles doutent, affirment ce qu'elles affirment indépendamment de toute étude sur la chose pensée, mise en doute ou affirmée. Cela vient directement du fait que l'on suppose au départ que les personnes qui adhèrent à ce genre d'opinion ont tort, ce qui nous dispense d'avoir à le vérifier de près. 

Si en 2003, j'avais exprimé mes doutes quant au discours de Colin Powell au Conseil de Sécurité des Nations-Unies de la manière suivante, je me méfie d'un gouvernement qui a plusieurs fois menti au cours de l'histoire récente, qui pratique l’interventionnisme militaire de manière pour le moins récurrente et qui possède une administration qui garde confidentiel bon nombre d'éléments qui seraient intéressant de livrer à l'opinion publique, si je dis cela en 2003, je suis considéré comme faisant partie de la mouvance conspirationnistes, et ce même si ce que je dis à une légitimité et se vérifiera de manière éclatante dix ans plus tard. 

Voilà où est le problème, au nom de la prétention scientifique à la rigueur et à l'exactitude, on en revient dans les faits à traiter de paranoïaque ou des esprits faibles, ceux qui ont pensé quelque chose qui s'est avérée et on alimente, se faisant, d'autres paranoïas qu’on prétend simultanément combattre. Au passage trois précisions : 

La première c'est que dans le débat qu’on peut faire preuve de dérision et de sarcasme, mais il faut savoir aussi, de temps en temps, prendre les gens qu'on a en face de nous au sérieux et cesser de croire que l'on détient forcément la clé du fonctionnement de leur pensée, celui qui pense différemment n'est pas forcément un fou. 

La deuxième, c'est que parmi les prétendus théorie du complot, certaines ne reposent pas seulement sur des croyances mais sur des études, autrement dit, elles ont au sens antique du terme un caractère scientifique, scientifique signifiant ce qui relève d'un savoir, il ne s'agit pas de croire, il s'agit de savoir, est ceux qui croient peuvent aussi, bien être conspirationnistes, qu'anti conspirationnistes, ils sont l'un et l'autre dans une attitude de croyance, on peut être dans la croyance on peut être dans l'irrationalité, la seule chose, c'est qu'on cesse alors de pouvoir communiquer par la raison, ce qui du coup rend le débat impossible. L'association du conspirationnisme à la paranoïa a un autre effet, quelle que soit d'ailleurs les intentions de ceux qui lancent cette accusation, c’est qu’elle interdit absolument de comprendre des phénomènes qui ne répondrait pas à des explications d'ordre scientifique, comme par exemple, les phénomènes politiques. Reprenons notre exemple de la guerre d’Irak et déroulons ses implications, on apprend que Colin Powell a reconnu avoir menti lors de son histoire à l’ONU, on apprend du même coup que la guerre en Irak a été construite sur un mensonge d'Etat, qui puisait sur un mensonge connu par des membres importants de l'administration parmi lesquelles au moins l'auteur du discours prononcé par Colin Powell lui-même, on apprend donc que les centaines de milliers de victimes civiles de cette guerre auxquels il faut ajouter les soldats américains eux aussi tués lors du conflit, puisque une vie n'a pas de nationalité ni d'opinions politiques, tous ces morts sont la conséquence d'un mensonge d'Etat, à partir de là, deux attitudes sont possibles : 

a, considéré que ces faits sont isolés circonstancielles et sans incidence sur d'autres faits, position anti conspirationniste ou bien 

b, considéré que ces faits font partie d'un tout, disons la politique militaire américaine de la fin du xxème siècle et du début du XXe et que dans ce cas, il est permis de faire des conjectures sur les mobiles qui font agir le gouvernement américain, La preuve y at il eut reconnaissance du mensonge de Colin Powell, autre que celle de Colin Powell lui-même y at il eut présentation d'excuses officielles, par exemple de la part du président Barack Obama par rapport à cette intervention militaire construite sur un FAUX ayant causé des centaines de milliers de victimes. Non il n'y a rien une telle, pas ma connaissance en tout cas, à partir de là, est-ce qu'il n'est pas naturel du moins compréhensible que certaines personnes adoptent une sorte de méfiance de principe, je dis bien, de méfiance pas de rejets à priori à l'égard de l'action du gouvernement américain alors même que ses dirigeants ne font rien pour diminuer cette méfiance, si vous invitez quelqu'un chez vous et que cette personne repart avec votre portefeuille vous aviez laissé sur la table du salon est ce que vous allez le réinviter chez vous le lendemain en disant après tout ce n'est arrivé qu'une fois, il ne faut pas être parano, il ne faut pas tomber dans le conspirationnisme, relevé un mensonge un vol, un préjudice et adopter une certaine méfiance préventive à l'égard de son auteur, est(ce de la paranoïa, certains diront, mais c'est normal, les Etats-Unis défendent leurs intérêts ils ne vont tout de même par connaître des choses qui mettrait en péril la stabilité de leur nation, je répondrais que je suis tout à fait d'accord avec ça, et je suis d'autant plus d'accord que c'est exactement la source, selon moi, du problème quand on parle de conspirationnisme, la sauvegarde des intérêts, la politique, l'économie, la défense sont des domaines de lutte d'intérêts, c'est même ça qu'il est défini, si l'histoire est faite de conflits c'est que l'histoire est d'abord l'histoire de luttes d'intérêts, on ne va pas reprocher au patron d'une entreprise de vouloir faire du profit sur le dos de ses employés, puisque c'est précisément la finalité d'une entreprise de produire du profit sur le dos des employés, en revanche lorsqu'une entreprise, pour faire du profit, a recours au mensonge, au trucage, à la violence, alors on ne peut pas dire que ça n'existe pas et que ceux qui le pense sont les esprits faibles et paranos, parce qu'alors il devient impossible de discuter. 

Nous sommes sans doute un peu fasciné par l'esthétique du complot qui est c'est VRAI un redoutable stimulant l'imaginaire, mais remplaçons le mot complot par celui de luttes d'intérêts ou de rapports de force et vous verrez que ce dont on se moque sous le nom de conspirationnisme ne désigne rien d'autre que la marche ordinaire du monde, ce n'est pas un constat paranoïaque ce n'est pas une vision cynique ou désabusés c'est le résultat d'une observation qui n'a rien de nouveau, espérons toutefois que l'anti conspirationnisme primaire quant à lui ne devienne pas le nouvel avatar du dogmatisme et du narcissisme qui n'ont pour effet que celui de nous maintenir dans l'ignorance et de Nous et du Monde. 

Charles Robin


 
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