L'intelligence d'un pouvoir se mesure à la faisabilité des règles qu'il impose. Sinon, l'absurde l'emporte et la population organise une vie parallèle. Que le discours officiel ait quelques distances avec la réalité est une norme, car il porte l'image d'une réalité, mais lorsque l'écart ente les deux est trop importante, c'est l'existence même de ce pouvoir qui est en jeu.
La radicalité des mesures prisese, la rigidité des dirigeants allant jusqu'à la provocation et l'amoralité (interdiction faite aux proches d'assister aux enterrements, amendes imposées à une personne invalide du 1er groupe alitée pour violation de l'assignation à domicile, etc), conduit au rejet par la population d'une situation devenue absurde et sans porte de sortie rationnelle. Seulement 23% de la population soutiennent les mesures d'assignation à domicile imposées. Il serait bon de se souvenir de l'importance, comme le Roi du Petit Prince, de donner des ordres raisonnables, ce qui permet, faute de contrôler la situation, tout au moins d'en donner l'impression. Les poussées caractérielles face à la montée d'une désobéissance massive - et assumée, ne sont pas les réactions politiquement les plus intelligentes pour préserver la paix sociale. Le pouvoir n'existe pas dans son propre intérêt et ne tire sa légitimité que de sa capacité à intégrer la volonté populaire. Ce simple bon sens semble être absent des manuels du parfait petit manageur, qui traînent un peu trop sur les coins de bureau.
Certaines personnalités médiatiques et loin de la politique, commencent à s'interroger sur le sens d'une telle politique ? Il est vrai qu'avec le dépistage massif et la réorientation budgétaire, la situation peut durer très très longtemps. Question d'un ancien sportif : Au début il fallait attendre qu'il y ait assez de lits. Maintenant qu'il y en a assez, il faut encore attendre autre chose. Attendre quoi, la révolte populaire ?
Massivement, les gens veulent retourner au travail. Le mythe du télétravail n'a pas réussi, pas plus que l'enseignement à distance (les écoles ont été fermées plus tôt), pas plus que la justice à distance (les parties peuvent à nouveau se présenter physiquement au procès), l'économie du pays s'effondre et le fantasme de "l'économie tout-numérique, économie de l'avenir" s'est écroulé dans le présent. Le monde merveilleux n'a pas pris. Les gens veulent leur vie, ils veulent travailler.
Comment expliquer cette fuite en avant ? Les élites dirigeantes sont-elles, pour une raison étrange, tombées dans le chaudron magique de la croyance en ce dieu global Covid et ainsi, dans la foulée, en chaîne, les élites parfaitement disciplinées, se font concurrence pour briller ? A chaque niveau, chacun s'adaptant et essayant de trouver - ou garder - sa place.
Les dirigeants fantasmés du nouveau monde sont nus. La population ne les a pas adulés. Mais à la différence du conte, ils ne courent pas, éperdus de honte, se rhabiller, criant un peu tard que l'on ne l'y reprendra plus. Non, ils intiment à leurs sujets de se taire et d'obéir, "pour leur bien", et de faire la claque dans cette pièce de théâtre surréaliste, jouant les prolongations, quand les spectateurs cherchent avec insistance les portes de sortie de secours.