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"Tout est langage" disait Françoise Dolto. Les mots que nous employons pour communiquer, mais aussi les gestes, les expressions du corps et du visage, le ton de la voix comme les attitudes et les comportements "parlent". Avec cette fine pointe que soulevaient les systémiciens qu'il est de toute manière impossible de ne pas communiquer. Même en restant silencieux par exemple, votre silence communiquera forcément un message.

Cela fait des années (l’imposture dont certains m’affublent ne m’a pas empêché de bosser dur au long des années !) que je m’intéresse à la santé institutionnelle, soit à cette manière qu'ont les organisations et leurs dispositifs d'être plus ou moins bien- ou maltraitants, aussi envers leurs usagers qu’envers celles et ceux qui y travaillent.

J’ai ainsi proposé dans le cadre d’un projet en santé publique (hélas sans en obtenir le financement) que soit réalisé à large échelle un inventaire des pratiques institutionnelles pour évaluer dans quelle mesure le langage et les comportements qu’on y observe se montre plus ou moins respectueux et bien-traitant des personnes (et donc contribue in fine à soutenir ou à endommager leur santé).

Dans le cadre de la planification sanitaire qualitative du canton de Genève, nous avions par exemple remarqué l’étonnante agressivité de certains courriers administratifs, secs comme des coups de trique, et énonçant sur un ton comminatoire, au premier retour de ligne, les sanctions qu'encourrait l'administré en cas de non-respect de certaines obligations.

Aucun d’entre nous n’aime à se faire parler ainsi. Et si parfois une certaine fermeté peut être indiquée, ici nous avions faire à bien autre chose : un tour relationnel infantilisant, désobligeant et même menaçant.

Ce n’est évidemment pas pour rien que je mentionne ceci. La manière dont on parle à quelqu’un mais aussi dont on la traite, à chaque étape d’une interaction institutionnelle, véhicule un ensemble de signifiants et de signifiés qui peuvent être respectueux (ils soutiennent alors la santé au sens large de la personne) ou irrespecteux (ils sont alors pathogènes, par la disqualification, l’humiliation ou la souffrance qu'ils génèrent).

Et oui, tous, nous sommes tous bien plus sensibles que nous aimerions le croire à ces « marqueurs » de la relation.

Je sonne l’alarme depuis des mois sur la violence -extrême à mes yeux- de la manière dont les autorités et les médias communiquent au sujet de la désormais endémie et des mesures sanitaires. Par leur autoritarisme anxiogène, ces communications sont elles-mêmes nocives pour la santé psychique de la population – dont tout confirme hélas qu’elle est, après de mois de ce régime insensé, en plein effondrement.

Keep calm and don’t panic !
Quoi qu’en disent ceux qui ne savent pas lire, je n’ai évidemment jamais nié la réalité du Covid-19 : il s’agit d’une épidémie (désormais endémie) moyenne à forte, requérant bien sûr de la prudence mais surtout du sang-froid, de la mesure et de la raison - en aucun cas de la panique.

Pour user d’une métaphore, la situation a été (selon les mois) comparable à celle du danger d’avalanche en haute montagne : parfois fort, parfois modéré, parfois heureusement faible. Étant entendu que les périodes critiques requièrent évidemment une prudence particulière.

Mais tout montagnard sait que la prudence et la vigilance (qui peuvent le cas échéant commander que l’on renonce à une course) n’ont rien à voir avec la panique !

Imaginez que par danger faible, on ne cesse de vous rappeler, quinze fois par jour, qu’il y a des avalanches et que des gens en meurent. Par danger moyen, qu’on vous alarme tout au long de la journée en criant : « Attention à ceci, attention à cela ! Regarde la pente, là : ouh là là elle part ! Ah non elle ne part pas ! mais elle aurait pu partir ! Et l'autre pente, là-bas, est-ce qu'elle tient ?! Ouh là là ! Ouh là là ! »

Avec, les jours de danger, un concert de sirènes à tout bout de champ, accompagné d'un rappel tonitruant martelé en boucle du nombre de personnes tuées par les avalanches chaque années, au cours de la semaine écoulée, le jour même dans les Alpes et à travers le monde (Cordillère des Andes et Montagnes Rocheuses inclues) sans oublier la montée en épingle dramatique de chaque accident dans chaque canton ou pays comme si aucune autre nouvelle au monde n’existait…

Vous devinez la chute : vous rendriez tout le monde fou ou en tout cas déprimé en peu de temps.

Or c’est exactement le traitement qui nous est infligé depuis 10 mois.
On aimerait simplement rappeler à nos autorités (mais elles sont trop emballées pour entendre) à quel point cette distinction entre prudence et panique est essentielle, et à quel point il est vital qu’elles arrêtent de nourrir la seconde !

Car outre la pression émotionnelle et psychique (déjà dévastatrice), la panique ainsi générée impacte le corps (et en particulier l’immunité) de manière lourdement pathogène.

Les progrès (au cours des trois dernières décennies) de la neuro-psycho-endocrino-immunologie ont établi l’importance des interactions entre les pensées et les émotions d’une part, la biochimie et la physiologie du corps de l’autre.

Cette compréhension culminant avec la mise en lumière des effets placebo et nocebo. A tel point que cet étonnant phénomène pourrait éclairer (au moins en partie) les différences de virulence du Sars-CoV-2 observées d’une région à l’autre.

Placebo, je plairai
Je commencerais par présenter ici l’effet placebo avec un extrait du livre que j’ai consacré en 2010 à une analyse des méthodes de soins non-scientifiques :

Au-delà du placebo
On sait que, selon les pathologies concernées et l’endroit où les études ont lieu (il y a en effet une forte variable culturelle selon les pathologies…), des substances ou pratiques n’ayant pas de vertu thérapeutique mais dont le patient qui les reçoit croit qu’elles en ont, peuvent produire des améliorations dans une marge allant de 20% à 80% des cas. Plus l’intervention est annoncée comme puissante (ou plus elle emprunte à des modalités reconnues comme telles) plus l’effet observé est important.

Des cas de « chirurgie placebo » ont été utilisés à la fin des années 1950, notamment en lien avec une forme d’angine de poitrine. Certains patients ont été endormis et opérés, à la distinction près que l’incision n’était que de surface et qu’aucune intervention n’était pratiquée à l’intérieur du corps. Le taux d’améliorations suivant ces opérations « placebo » étaient de l’ordre de 80%, soit l’équivalent des opérations réelles [1].

On a par la suite renoncé à de telles pratiques pour des raisons éthiques. Il est considéré en effet comme contraire à l’exigence de vérité et à la qualité de la relation thérapeutique qu’un médecin prescrive une substance ou une intervention qu’il sait ne pas avoir d’effet. Pourtant, comme le pointe joliment certains auteurs [2], nous nous retrouvons face à un paradoxe : s’il peut être contraire à l’éthique d’utiliser un placebo, cela peut l’être tout autant de ne pas utiliser quelque chose susceptible de produire une guérison dans un nombre significatif de cas !

Le débat dans le domaine médical est intense et n’est pas près de s’apaiser. La majorité des médecins recourent régulièrement à des placebos, et ceux-ci occupent une place de facto dans l’arsenal thérapeutique.

Pourtant, le terme même de placebo est contesté. L’anthropologue Moerman [3] a joliment souligné le contre-sens que constitue ce terme puisqu’il décrit « une substance qui a un effet avéré sur une condition sur laquelle elle n’a pas d’effet avéré ». A cette notion de placebo, attribuée à une manière inerte, Moerman propose de substituer celle d’effet de signification. C’est bien dans le sens attribué par un patient à l’ingestion d’une substance ou d’un geste techniquement inertes qu’il faut voir les leviers d’une éventuelle amélioration.

Ce sens se construit autour de l’anticipation par le patient quant aux effets annoncés, de l’intensité de sa motivation et de sa foi dans le traitement, ainsi que des caractéristiques imaginaires ou symboliques de celle-ci. On a ainsi pu observer que des pilules placebos présentées comme stimulantes avaient un effet dynamisant sur le rythme cardiaque et la pression artérielle, et inverse lorsque présentées comme calmantes. Des « calmants » de couleurs froides sont par ailleurs plus efficaces que ceux de couleurs chaudes, l’inverse étant vrai des « stimulants ». Les comprimés sont plus efficaces sous forme de capsules que de tablettes, leur taille ainsi que leur prix faisant une différence, ainsi que les attentes des soignants qui les prescrivent. Cette variable pourrait rendre compte du phénomène couramment observé que c’est au moment de leur mise sur le marché que les médicaments sont les plus efficaces, ce taux déclinant invariablement au cours des ans, à mesure que les limites à leurs vertus sont mieux connues [4]...

Les réseaux neuronaux impliqués dans les processus de croyance et d’anticipation positive sont maintenant clairement identifiés, avec une cascade partant de différentes zones de nos cortex (l’enveloppe supérieure de notre cerveau) pour atteindre des couches plus profondes (notamment au sein du système limbique) pour ensuite influencer des processus physiologiques. Ceux-ci se traduisent le plus souvent par une réduction du stress, un apaisement de la douleur, la stimulation du système immunitaire et des forces naturelles d’auto-guérison [5].

Le meaning effect est un concept prometteur, qui rejoint de nombreux constats posés aussi bien en anthropologie de la santé (autour de la notion d’efficacité symbolique) que dans le courant émergent de la médecine narrative [6] : à savoir, que l’état de maladie est toujours investi par celui qui en souffre d’un ensemble de significations riches en contenus existentiels et affectifs, élaborés dans le cadre des références culturelles disponibles. Une thérapeutique, de ce point de vue, interagit aussi inévitablement avec les narrations construites de la personne d’une manière qui va résonner (et fournir le point d’appui d’une possible évolution favorable) ou non.

Un patient est inévitablement en recherche de nouvelles perspectives et, par-là, de nouveaux pouvoir d’agir, face à son état de santé. Plus les modalités du traitement sont denses et investis de force symbolique, plus ils ont de chance d’être opérants. Ce qui explique par exemple qu’une injection placebo est plus efficace qu’un comprimé placebo, et qu’une opération placebo se situe en haut de l’échelle des effets possibles, la chirurgie restant un type d’intervention symboliquement fascinante par l’infraction du corps qu’elle met en scène.
Une découverte récente est venue encore complexifier cette question puisque le Pr Ted Kaptchuk, de la faculté de médecine de Harvard, a montré que le placebo était encore agissant même si le patient qui le prend est informé qu’il s’agit d’un placebo [7] !

L’hypothèse en ce cas est que l’effet thérapeutique est d'ordre relationnel. Ce qui se laisse apprécier si l'on imagine un médecin qui dirait simplement à son patient : « Je ne vais pas vous raconter d’histoire, ce que je vous donne est un simple placebo et je ne vais donc pas vous faire croire qu’il contient un quelconque principe actif. Mais comme on sait que parfois le placebo aide même quand le patient sait qu’il s’agit d’un placebo, eh bien il me semble que cela vaut la peine d’essayer. Seriez-vous d’accord de le prendre ? »

L’humilité, la sincérité, le caring (soit à la fois le souci et le fait de prendre soin de l’autre comme on dit à défaut d’un mot équivalent français) qu’il exprimerait ainsi sont tels que ces qualités personnelles et relationnelles deviennent elles-mêmes agent thérapeutique !

Nocebo, je nuirai !
L’inverse du placebo (mot signifiant « je plairai » en latin) est le nocebo (« je nuirai »), effet par lequel une personne, souffre par auto-persuasion des effets d’un agent inexistant. Voici le résumé du chapitre de référence d'une monographie portant sur ce phénomène :
Les effets nocebo sont extrêmement courants dans la pratique clinique, et ils sont induits par les attentes négatives d'un patient concernant le résultat d'un traitement. Ils peuvent survenir après un traitement inerte ou après l'administration d'une substance pharmacologiquement active et moduler le résultat du traitement. Les effets nocebo en pratique clinique se manifestent par la détérioration d'une symptomatologie préexistante ou par le développement de nouveaux symptômes qui sont souvent considérés comme des effets secondaires non spécifiques et sont attribués au régime médical. Les réactions de nocebo peuvent être induites par des éléments de la rencontre thérapeutique, par exemple la communication du diagnostic, l'information sur le traitement, la divulgation des risques et des avantages du traitement, ou l'interaction verbale pendant le traitement.
L’histoire abonde de personnes étant tombées malades (parfois jusqu’à en mourir) d’avoir cru par exemple avoir été infectées par un microbe mortel. Nous connaissons aussi dans ce registre - selon la description donnée par Walter Cannon en 1942- l’ethnologiquement fameuse « mort vaudoue » décrivant (dans les cultures cultivant ce type de croyances) le trépas de personnes convaincues d’être la cible d’un sort mortel sans possibilité de fuite ni de mise en échec de l’action occulte qui les vise .

Il n’étonnera pas je pense le lecteur de savoir que l’angoisse (et dans son visage le plus intense la panique) constitue bien le principal facteur générant l’effet nocebo. C’est dire si la communication anxiogène jusqu’à l’absurde déployée par les autorités et les médias au cours des mois écoulés sont (inévitablement) à l’origine d’une partie -certes difficile à évaluer- des dégâts qui se sont produits.

Coronagraben
La différence en termes de gravité du Covid-19 en Europe entre les pays et régions germanophones et francophones (ou latines) est impressionnante. La comparaison entre la France et l’Allemagne crève les yeux, alors qu’il s’agit bien sûr de pays voisins, avec des caractéristiques proches en termes de démographie, d'environnement et de climat.

Pourquoi donc la France a-t-elle connu quatre fois plus de décès ? Une grande partie de cette réponse tient à ce que j’ai annoncé dès le mois d’avril : que l’essentiel de la surmortalité était en quelque sorte « politique » soit due aux décisions et mesures sanitaires.

L’Allemagne, par exemple, a dépisté le Covid-19 très tôt, prenant les devants dès le mois de janvier en développant massivement sa capacité de testing. Or on sait que le dépistage précoce est un des rares paramètres (contrairement au confinement, au couvre-feu ou au port du masque) à être inversement corrélé avec la mortalité.

Une autre raison évident est que l’Allemagne a laissé ses médecins-généralistes remplir leur rôle de premier rideau, notamment en prescrivant largement le protocole hydroxychloroquine-azithromycine (plus zinc et vitamine D3 de préférence). Sachant que le traitement précoce (avec la tri-thérapie de l'IHU, ou même des macrolides, l'ivermectine ou l'Artemisia employée avec succès à Magadascar) réduit (quoi qu’ose en dire la voix de la corruption systémique) au moins de moitié les hospitalisations et la mortalité. Pour ceux qui en douteraient encore, le documentaire Mal Traités qui vient de sortir et a échappé (lui) à l'anathème "complotiste" est aussi éclairant qu'il est possible.

L’Allemagne ensuite dispose d’une moyenne de 36 lits de soins intensifs pour 100'000 habitants (contre seulement 11 à la France après les coups sombres opérées par les gouvernements successifs.

Enfin, nos germaniques voisins sont restés sereins face à cette « terrible pandémie » avec des autorités qui leur ont parlé « comme à des adultes » pour reprendre la jolie expression d’un observateur là où nos voisins français partaient dans un psychodrame collectif halluciné, avec des autorités accumulant les mensonges, les décisions arbitraires et abusives et s’adressant à leur population « comme à des enfants. » Ce qu’un article de presse de nos voisins du Nord a fort éloquemment résumé sous l’appellation « Absurdistan ».

In der Schweiz
La Suisse, de fait, constitue un joli objet d’études. Le Coronagraben existe bel et bien et l’on a vue en effet nombre de différences significatives entre la Suisse romande et alémanique. Genève, à l’extrême Ouest de la Confédération, avec son élite se prenant selon l’expression consacrée pour « les Parisiens de la Suisse » aura effectivement singé nos voisins dans ses réponses, portées par un ministre à l’autoritarisme digne de ses homologues tricolores et pilotée par une technostructure médicale et une bureaucratie sanitaire pareillement azimutées. Avec pour résultats -et de loin- les pires de notre pays.

Ce n'est pas que la critique est aisée, c'est qu'il y a simplement des bonnes pratiques et une éthique de la santé publique ; et quand on s'assied dessus, les résultats ne sont pas bons.

« Un État "mal armé et mal préparé" à une crise majeure, une gestion chaotique avec de multiples retards - sur les masques, les tests, dans les Ehpad -, sans pilotage unifié et marquée par l’hospitalo-centrisme, une deuxième vague mal anticipée » : ce sont les conclusions sévères du rapport de la commission d’enquête de l’Assemblée nationale sur la gestion du Covid-19 adopté par les députés mercredi matin.

"La France ne se situe pas dans les bons élèves" en Europe, selon les auteurs du rapport. A vrai dire, Genève non plus !

Rappelons au passage que le Grand Conseil a renoncé (pourquoi diable ?!) à sa responsabilité démocratique de faire ce travail d'analyse. Mauro Poggia et ceux qui le conseillent peuvent respirer : ils auraient été bien mal pris. Et tant pis pour les citoyens, dont "c'est de toute manière la faute" s'il y a eu (comme partout d'ailleurs) une résurgence saisonnière !

Et non, ce n'est certainement pas la faute aux mauvais esprits et aux complotissss, comme une certaine paranoïa gouvernante l'affirme en boucle...

Je partage pour terminer le lien vers l’excellent article d’Amèle Debey (encore un !), la première journaliste à avoir creusé la question des vraies raisons du Coronagraben sans tabous…. et sans conflits d’intérêts, ceci pouvant éventuellement expliquer cela !

«Coronagraben»: une fausse énigme?
par Amèle Debey, L'Impertinent média.

Depuis quelques jours, la question intrigue. Pourquoi les Suisse-allemands enregistrent-ils des infections au virus inversement proportionnelles à la dureté de leurs mesures de précaution? Les médias publics se penchent sur la question et vont jusqu’à soulever des hypothèses invraisemblables, en sous-estimant la différence principale entre les deux plus grandes régions de Suisse: la peur et ses effets délétères. La Suisse romande imite la France dans ses réactions disproportionnées, alors que le discours semble plus raisonné et la situation gérée avec le sang-froid réputé aux Allemands, outre-Sarine. Qu’en est-il de ce Röstigraben émotionnel? Pourquoi nos différences culturelles et linguistiques influent-elles autant notre santé? La réponse pourrait bien se trouver dans un certain effet Nocebo. Explications. Lien vers l'article sur L'Impertinent média.


 
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