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Le soir du 8 janvier 1910, Jean-Jacques Liabeuf sillonne les rues du IVe arrondissement de Paris avec la ferme intention de se venger d’une condamnation injuste. Cet ouvrier cordonnier veut "dégringoler un flic".

En cherchant à régler un compte personnel, Jean-Jacques Liabeuf ignorait qu’il déclencherait un virulent débat de société. C’est typiquement quelqu’un qui a fait peu d’études et a dû apprendre un métier pour gagner sa vie et petit à petit est devenu apprenti dans différents domaines. 


Épisode 1 : La nuit de la vengeance 
Quelques mois plus tôt, le 30 juillet 1909, dans ce même secteur de Paris, Jean-Jacques Liabeuf est arrêté en compagnie de sa bien-aimée par les agents Maugras et Vors. Pour ces brigadiers de la police des mœurs, puisque cette Alexandrine Pigeon est une prostituée, Liabeuf est forcément son souteneur. Par conséquent, il est arrêté et traduit le 14 août devant la huitième chambre correctionnelle de la Seine. Face à la cour, même si Liabeuf se proclame innocent, la peine pour "vagabondage spécial" est ferme : trois mois de prison, cent franc d’amende, cinq ans d’interdiction de séjour. 

Le 8 janvier 1910, Jean-Jacques Liabeuf s'apprête à commettre l'irréparable. Lui qui ne boit d'ordinaire que du lait - c'est ce qu'avouera sa logeuse - a descendu plusieurs chopines de vin blanc aux Caves modernes. C'est là, en sortant de la taverne rue Aubry-le-Boucher, qu'il croise la route de Célestin Deray et Lucien Fournès. Quand ces deux agents l'empoignent, les deux hurlent de douleur. Sous la pélerine qui lui couvrait les épaules, l'homme dissimulait à chacun de ses bras de larges brassards de cuir garnis de clous acérés. L'un de ces brassards garnissait le poignet, l'autre le dessus du coude. Et les agents se sont cruellement blessés à leur contact. 

Ce fait divers va prendre une toute autre dimension sous la plume du journaliste polémiste Gustave Hervé. En signant "L’exemple de l’apache" dans l’édition de La Guerre sociale du 12 janvier 1910, le rédacteur loue son geste vengeur et courageux et lance "L’affaire Liabeuf". 

On peut très vite avoir une carrière déviante à partir de vols commis, souvent, justement parce que l’on est dans une période de chômage. C’est le cas de Liabeuf, quand il est adolescent à Saint-Etienne. Là, c’est incarcération, casier judiciaire et, quand vous avez un casier judiciaire, automatiquement au moment du service militaire, on vous envoie dans les bataillons disciplinaires, les bataillons d’Afrique où là vous êtes mélangés à des gens qui sont déjà bien avancés dans la carrière délinquante. Anne Steiner, maître de conférences en sociologie et auteur d'ouvrages de référence sur les luttes sociales. 


 
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