L’actualité récente n’est pas tendre avec les idéaux ouatés d’un monde plus douillet que certains formulent et tentent d’imposer au travers de politiques de plus en plus hardies : même (et surtout) avec les meilleures intentions du monde (au moins affichées), la réalité ne se laisse pas faire.
Ainsi, puisque les intrants (notamment les fertilisants) coûtent cher et qu’en plus de cela, ils sont abondamment (et vertement) critiqués pour leur impact environnemental, nombre de pays ont décidé d’en limiter l’usage. Eh oui : petit-à-petit, ce qui a sorti l’Humanité de la famine et des pénuries alimentaires est courageusement combattu par les écologistes qui, incidemment, ont trouvé là un moyen malin de réduire de fait la population terrestre à moyen et long terme.
Surprise totale : malgré ce but réjouissant, certains peuples émettent des protestations et refusent de voir la situation se dégrader ou, alternativement, de mourir de faim en silence.
Au Sri-Lanka, l’interdiction des engrais a légèrement agacé les fermiers locaux qui ont jugé nécessaire de se débarrasser violemment de leur gouvernement : la décision de retrait total de tout engrais synthétique, inspirée et préparée par le Programme des Nations Unies pour l’Environnement, a directement provoqué un effondrement de la production agricole et des famines qui ont conduit le peuple à démettre ses dirigeants un peu trop volontaristes dans leur écologisme total.
Il sera difficile de ne pas dresser un parallèle avec ce qui se passe actuellement en Union Européenne où le programme « De la ferme à la fourchette » envisage une réduction de ces mêmes intrants de 20% à horizon 2030 : ceci commence déjà à se traduire dans les politiques nationales des pays membres et de petites tensions sont déjà palpables entre ceux qui décident, de façon de plus en plus unilatérales, et ceux qui appliquent, de façon de moins en moins volontaire.
C’est ainsi que les fermiers néerlandais – dont la presse grand public ne fait guère mention – marquent actuellement de façon aussi claire que ferme leur désaccord fondamental sur les décisions prises par leur gouvernement dans un mélange d’irresponsabilité économique et d’affichage vertuel écologiste un tantinet dangereux ; afin de promouvoir une agriculture prétendument plus respectueuse de l’environnement, le gouvernement social-démocrate de Mark Rutte, douillettement favorable aux agendas du Forum Économique Mondial, entend donc réduire ses rejets azotés et carbonés dans de telles proportions que plus de la moitié des exploitations agricoles du pays pourraient être amenées à arrêter leurs activités.
Le constat n’est pas très différent en Pologne ou en Allemagne dont les agriculteurs ont rapidement rejoint le mouvement néerlandais pour des raisons similaires.
S’ajoutent à ces considérations écologiques des éléments encore plus terre-à-terre comme les prix des intrants eux-mêmes, directement liés au prix de l’énergie qui bondit actuellement suite, là encore, à de fines décisions politiques et économiques internationales : entre la distribution d’argent gratuit des autres (qui alimente l’inflation) et les décisions géopolitiques assez peu affûtées (qui alimentent les pénuries qui alimentent l’inflation), tout semble s’accumuler pour créer une tempête parfaite.
À chaque fois, le schéma est le même : poursuivant un agenda déjà décidé unilatéralement, avec des échéances extrêmement courtes et des objectifs parfaitement grotesques, les décideurs tentent le tout pour le tout et imposent leurs décisions de façon de plus en plus autoritaire. Devant le désastre (prévisible ou observable), la réaction est, à son tour, de plus en plus violente. Pour la contrer, l’opposition est alors qualifiée de fasciste et/ou de populiste dans un mouvement qui prend rapidement de l’ampleur sur toute la planète, avant l’option, maintenant évidente, d’un usage de plus en plus appuyé de la force.
C’est bien d’un mouvement global qu’il s’agit ici : les partis de système, qui se présentent volontiers comme sociaux-démocrates, passent doucement du centre à l’extrême-centre, cette nouvelle situation politique dont les positions seront présentées comme modérées mais qui sont rapidement imposées à tous par la propagande, puis par l’indifférence aux oppositions voire le pur déni démocratique, puis la coercition la plus ferme. En d’autres temps, on parlerait de dictature, mais le faire serait… populiste, voyons.
Politiquement, cela se passe de moins en moins bien : Bulgarie, Pays-Bas, Pologne, Allemagne, France, Italie, Royaume-Uni, les pays s’accumulent où se font nettement sentir les difficultés politiques des gouvernements en place qui n’ont plus de marge de manœuvre et doivent maintenant composer avec un peuple et des parlements de plus en plus hostiles.
L’ambiance est délétère où les politiciens les plus avisés (et sans doute les plus à même de calmer la situation) ne se bousculent plus guère pour reprendre le pouvoir, tant l’atmosphère politique semble volatile : par exemple, Macron en France a dû se contenter de troisièmes couteaux à l’affûtage très approximatif, Draghi en Italie a proposé sa démission au président, mais les perspectives électorales étant médiocres, ce dernier la lui a refusée. En Allemagne, le parti de l’actuel chancelier a subi des revers marqués lors des dernières élections. On n’évoquera même pas les élections de mi-mandat américaines qui promettent un grand moment de solitude pour les Démocrates…
Partout s’observe ce décalage entre la base et les dirigeants qui continue de s’agrandir à mesure que s’empilent des décisions politiques de plus en plus déconnectées des réalités pratiques des citoyens.
Ce décalage n’est pas nouveau mais s’illustre de façon croissante entre une élite, suivie par une petite proportion du peuple, résolument décidée à appliquer les objectifs intenables d’écologisme ultime au fond marxiste à peine caché (« Vous ne posséderez rien mais vous serez heureux » – ou sinon…) et le reste de la population qui résiste maintenant clairement à ces impératifs et cet agenda.
Et cette résistance est d’autant plus visible à présent qu’elle est ouvertement labellisée « populiste » par les médias grand public et la propagande politique actuelle : de la même façon qu’il a fallu étiqueter « conspirationnistes » ceux qui avaient l’impudence de proposer des informations alternatives à la presse officielle, on distribue encore et encore du « populiste » à ces dirigeants qui ont le toupet de mettre en avant les intérêts de leurs concitoyens avant ceux des écologistes, des va-t-en-guerre ou de toute la clique mondialiste. Au passage, on ne pourra s’empêcher de noter que ce sont ces « populistes » qui s’en sortent le mieux actuellement : Orban, en Hongrie, a ainsi été reconduit avec une confortable majorité. L’actuel parcours de Trump et de ses équipes aux États-Unis participe du même mouvement. Ni Poutine, ni Xi ne semblent en difficulté chez eux.
Combien de temps ces tensions pourront subsister sans se traduire par des renversements politiques, éventuellement violents ? Combien de mois les dirigeants actuels pourront-ils continuer de pousser leurs politiques énergétiques et écologistes, leur « agenda 2030 », sans que les peuples ne protestent ? Comment imaginer que l’hiver prochain, énergétiquement tendu, se passera d’une bonne couche de « populisme » ?
En tout cas, chaque semaine qui passe montre que si l’écologisme politique doit mener l’Humanité, il n’est pas dit que ce ne soit pas à sa perte.