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De nombreux pays d'Afrique reprochent au tribunal de la Haye (CPI), censé être universel, de ne juger pour le moment que des dirigeants africains. Le Burundi, la Gambie et l'Afrique du Sud ont annoncé leur retrait du statut de Rome.

Après l'Afrique du Sud et le Burundi, c'est la Gambie qui vient d’annoncer son retrait de la Cour pénale internationale. Jamais un seul pays n'avait quitté cette institution depuis son entrée en vigueur en 2002.

« A partir de ce jour, mardi 24 octobre, nous ne sommes plus membres de la CPI et avons entamé le processus prescrit par le statut fondateur pour nous en retirer », a annoncé Sheriff Bojang dans une déclaration à la télévision nationale reprise sur les réseaux sociaux et diffusée sur YouTube. Le ministre a accusé la CPI de « persécution envers les Africains, en particulier leurs dirigeants », alors que selon lui «au moins 30 pays occidentaux ont commis des crimes de guerre » depuis la création de cette juridiction sans être inquiétés. La Gambie a tenté en vain de convaincre la CPI de poursuivre les pays de l'Union européenne pour la mort de nombreux migrants africains en Méditerranée, a noté Sheriff Bojang, précisant que son pays avait menacé de prendre des mesures s'il n'était pas entendu.

Le 12 octobre dernier Pierre Nkurunziza, le président burundais, accusé par le CPI de violations des droits humains, a ouvert la danse en annonçant lancer des formalités pour se retirer du statut de Rome. Trois jours plus tard, c'est la première puissance africaine, l'Afrique du Sud qui a suivi. Pretoria affirme que l'adhésion au traité de Rome serait en contradiction avec ses engagements en termes d'immunité diplomatique.

L'an dernier, les autorités sud-africaines avaient notamment refusé d'arrêter le président soudanais Omar el-Bechir qui fait l'objet d'un mandat d'arrêt de la CPI pour génocide. Dans la foulée, la Gambie annonçait elle aussi son départ « À partir de ce jour, mardi 24 octobre, nous ne sommes plus membres de la CPI et avons entamé le processus prescrit par le statut fondateur » a annoncé hier soir son ministre de l'Information Sheriff Bojang.

Le Burundi et la Gambie n'ont cependant pas de notification officielle auprès de secrétariat de l'ONU contrairement à l'Afrique du sud qui a suivi la procédure. Si dans le futur des crimes sont commis sur ces territoires, il n'y aura plus de possibilité de poursuite.

« Deux-poids, deux mesures » et « chasse raciale »
Crée en 1998, la CPI est la seule juridiction permanente et universelle, contrairement à d'autres cours mises en place pour juger des crimes particuliers. 122 pays sur 193 y ont adhéré. Mais malgré cette universalité de principe, sur les dix affaires actuellement instruites par la Cour, neuf sont africaines : l'Ouganda, la République démocratique du Congo, la république de Centrafrique deux fois, le Darfour, le Kenya, la Libye, le Mali et la Côte d'Ivoire. Les dirigeants africains reprochent le « deux-poids, deux mesures » d'une cour « néocolonialiste ». Ainsi récemment, la Gambie avait demandé à la CPI de poursuivre les pays occidentaux pour la mort de milliers de migrants en Méditerranée.

En Afrique, la contestation gronde depuis longtemps. Depuis 2014, la propagande africaine anti-CPI prend un tournant, avec la mise sur le banc des accusés, le président kényan accusé d'avoir joué un rôle dans les violences postélectorales qui ont coûté la vie à 1300 personnes en 2007. La défense du chef de l'État a été celle d'un « procès de rupture » : il a accusé la CPI de concentrer ses enquêtes uniquement sur les dirigeants africains et a demandé une réforme de son statut. Les charges ont été abandonnées faute de preuves. Avant lui, le Soudanais Omar-al-Bashi avait contesté la compétence de la Cour.

L'Union africaine elle-même a ouvertement critiqué la CPI. A l'issue d'un sommet en 2013, le Premier ministre éthiopien, Hailemariam Desalegn avait dénoncé une « chasse raciale ». « Elle ne devrait pas pourchasser des Africains », avait-il ajouter. L'éventualité d'un retrait collectif des 34 États africains signataires du statut de Rome a une nouvelle fois été évoquée, fin janvier 2016, à Addis-Abeba.






 
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