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Retour à la couverture insidieuse de "Jeune Afrique " sur le Maroc et le terrorisme. En augmentant sensiblement le texte (qui va être publié sur Wakeupinfo sur trois éditions, de ce vendredi au dimanche 24 septembre 2017), l'objectif consiste en premier lieu à approfondir l'analyse critique esquissée ici même auparavant, de l'actualiser en rapport à d'autres éléments fournis par les médias au Maroc. 

Revenir sur ce dossier, permet en second lieu de discuter le contenu de certains articles sur cette thématique que "Dounia News" en particulier, a bien fait de reproduire à titre d'information dans ses toutes dernières revues de presse hebdomadaires. 

Enfin, des suggestions pour l'action seront précisées. 
Ce faisant, cela permet ainsi d'élargir le débat sur la question et de fournir les clarifications qui s'imposent, comme contribution à la nécessaire déconstruction d'un certain nombre d'idées reçues simplistes, "Born and made in Jeune Afrique", consistant notamment en la "marocanisation" du terrorisme en Europe et qui continuent à être véhiculées sur ce sujet par d'autres milieux, y compris officiels dans certains pays, avec une légèreté certaine. 

Hormis quelques plumes qui l'ont justifiée avec des arguments irrecevables comme on le verra, qui parmi les citoyens marocains, de l'intérieur du pays ou de l'extérieur, n'a pas été choqué et ne s'est pas senti insulté et offensé par la scandaleuse couverture du numéro 2955 du magazine français "Jeune Afrique" basé à Paris, datant du 28 août au 3 septembre 2017, mettant en gros plan les images de 10 terroristes de Barcelone autour de l'étoile du drapeau marocain sur fond rouge et vert, en précisant au-dessous du mot "terrorisme" : "Born in Morocco" !? 


"BORN IN MOROCCO" : Plusieurs interprétations simultanées 
D'abord, pourquoi au lieu de choisir comme titre "Born in Morocco", on n'a pas mis "Radicalisés en Europe" ? Visiblement, le choix n'est pas innocent, car cette option, plus proche de la réalité, n'aurait pas permis d'arriver à l'objectif assigné, à savoir tirer à bout portant sur le Maroc, en visant sa crédibilité.

En second lieu, curieuse et bien cynique est la façon pour un périodique paraissant en français, qui se veut de plus, un chantre de la francophonie (et de la Françafrique), d'utiliser ce titre en anglais ! Mais l'usage est voulu, faisant d'une part "tendance", et surtout n'est pas neutre. Par calcul machiavélique et un montage insidieux et fourbe, on cherche à gagner sur plusieurs tableaux à la fois. On est en effet en présence d'une instrumentalisation de la "com", en manipulant certains procédés et techniques. 

Certes, en reprenant la formule utilisée ultérieurement par le directeur de la rédaction de "Jeune Afrique"(François Soudan) pour se défendre, " il ne nous a pas échappé " que la couverture en question n'a pas mis "made in Morocco" en dessous de terrorisme, c'est à dire "terrorisme fabriqué au Maroc", mais nous lui rétorquerons que lorsqu'on écrit le mot "Terrorisme" et en dessous on place "Born in Morocco", l'agencement sémantique ainsi construit et pensé, élargit clairement le champ de l'amalgame, et voici pourquoi. 

La traduction en français de "Born in Morocco" dépend de qui est visé ou concerné en la matière. Si à la place de ""born ", on met l'équivalent en français, on est obligé d'accorder le mot. Soit on met né avec le "s", et cela va renvoyer aux terroristes nés au Maroc et rien de plus, soit on met le mot sans "s" et cela va donner "terrorisme né au Maroc", seule interprétation possible. 

Ne voulant pas mettre l'accent sur le fait que les causes réelles de l'attentat terroriste de Barcelone sont liées à la question du contexte et du lieu de la radicalisation, et n'ayant pas le courage politique et intellectuel d'assumer toute leurs responsabilités en dévoilant leur intention réelle liée à un agenda occulte, celui de faire porter le chapeau au Maroc en tant que pays dans son ensemble, les auteurs de la couverture et les commanditaires ont choisi intentionnellement une autre option..

Ils ont fait le choix de la formulation du titre en anglais qui permet en effet sa traduction de deux manières, offrant ainsi la possibilité de miser d'une part sur l'ambiguïté, afin d'esquiver d'assumer leur choix en s'exonérant de leur responsabilité, et de gagner d'autre part en termes de stigmatisation et de manipulation : soit terrorisme né au Maroc, soit terroristes nés au Maroc, soit les deux à la fois. En faisant passer le message comme quoi, l'origine du terrorisme et sa source, se trouvent en terre marocaine et qu'en même temps, dans leur très grande majorité si ce n'est dans leur totalité, les terroristes sont nés au Maroc. Mais reconnaissons qu'avec cette démarche machiavélique, on laisse tout de même le choix aux lecteurs entre la peste et le choléra...

Est-ce simplement, comme certains l'ont avancé, le résultat d'un "rapport de force" au moment de la période estivale au sein de la rédaction de l'hebdomadaire, sachant qu'il y'a bien entendu, la géo-politique et la géo-stratégie, des agendas déterminés et bien des intérêts en présence, le magazine se voulant être par ailleurs un outil et un instrument d'influence ? Mais nous n'allons pas nous attarder sur des querelles de services et nous "positionner" en fonction de certains intérêts, en dosant notre analyse en conséquence, pour favoriser tel ou tel clan, ménager un autre...

Disons-le tout net, de manière directe et franche. La motivation de la présente contribution au débat public, n'est pas la recherche du renforcement de la position du "clan" des Marocains au sein de la rédaction du magazine pour des raisons notamment de carrière. On n'est pas là pour faire des compromissions. L'enjeu est tout autre et bien plus important, renvoyant au nécessaire redressement de l'image de marque du pays, qui doit être la préoccupation et le devoir de chaque citoyen. Notre analyse est celle d'un chercheur universitaire, indépendant d'esprit, jaloux de sa liberté de parole responsable et on s'en tient là au niveau de notre démarche. 

Toujours est-il que cette couverture de l'hebdomadaire parisien a été faite de manière délibérée, véhiculant un message très clair, nuisible au Maroc. L'orchestration a bien été réfléchie et préméditée pour dénigrer au maximum ce pays, avec la volonté manifeste de nuire à son image de marque par des raccourcis simplistes et réducteurs, en le présentant comme un terreau de violence, de haine, de cruauté, de barbarie, comme un foyer dangereux du terrorisme, un pays pourvoyeur de terroristes, un pays ayant une marque de fabrique de terroristes. En bref, un "État voyou" comme disait l'autre (un ancien président junior) pour d'autres pays, un État à marquer au fer rouge, qu'il s'agit de mettre au ban de la communauté internationale, de déstabiliser et de combattre, par ce qu'il ferait partie en quelque sorte de "l'axe du mal" absolu ! Et oui, il n'y a là aucune exagération ou dramatisation excessive. La logique des choses avec la démarche "Born and made in Jeune Afrique", amènerait jusque-là !!! 

Le parti pris est flagrant. Par rapport au Maroc, les responsables du magazine font ainsi désormais de l'amalgame et de la confusion à son encontre, le fil directeur de leur politique et la ligne éditoriale de leur publication. Il n'y' a pas seulement un simple soupçon de préméditation. L'intention perfide de porter atteinte à la crédibilité du Maroc et à son esprit de responsabilité dans la lutte contre le terrorisme est manifeste. Elle est bien née d'une mauvaise intention, et il n'y a pas lieu, comme argument de défense utilisé par certains, de mettre en parallèle certains numéros où le magazine français paraîtrait "bienveillant" envers le Maroc. Pour tous les pays africains, on ne demande pas d'ailleurs de complaisance, mais des informations fiables ainsi que des analyses équilibrées, honnêtes et responsables, ce qui n'est pas le cas le plus souvent, le contenu d'articles et de dossiers ainsi que de la couverture et de son orientation, dépendant du plus offrant (ou au contraire de celui qui rechigne à donner). 

Comme pour anticiper les critiques qui n'allaient pas manquer de venir, les stratèges -concepteurs de la couverture ont ajouté en tout petits caractères que l'on ne peut découvrir qu'avec une loupe : " radicalisés en Europe", mais en faisant précéder ceci de : "nés au cœur du royaume ", signifiant par-là, avec la couleur rouge (sang) du drapeau national, un des symboles de l'Etat marocain, que les Marocains ont le terrorisme dans les veines. Leur cœur bat avec des pulsions terroristes. 

Terrorisme né au Maroc, amène à une série d'accusations gratuites très graves. Cela veut dire également avec cette approche sournoise, pleine de hargne et d'hostilité, que c'est le Maroc qui crée, produit et fabrique du terrorisme, que le Maroc est un repaire de terroristes-nés, le creuset du terrorisme djihadiste en Europe, un vivier du terrorisme, ce qui constitue un affront à tous les Marocains et une insulte au Maroc, à son histoire, à ses valeurs, à sa civilisation et à sa réputation à l'échelle internationale. 

PRODUCTEUR DE TERRORISTES !!!
On constate ainsi que les auteurs de cette conception médiatique vicieuse et hypocrite, essayent de ménager la chèvre et le chou, soufflent le chaud et le froid pour se couvrir, mais la compréhension dominante qui se dégage de cette couverture honteuse est une image accusatrice sans fard : le Maroc est bel et bien un pays PRODUCTEUR DE TERRORISTES, comme d'autres organes de presse dans le passé ont eu tendance à le présenter comme pays PRODUCTEUR D'ÉMIGRÉS CLANDESTINS contre lequel il faut se protéger, ou plutôt qu'il faut combattre et prendre des mesures de rétorsion. 

Il est vrai que, par rapport au Maroc, le magazine n'a pas utilisé littéralement la formule "exportateur de terrorisme" ou "exportateur de terroristes" comme l'a fait le sociologue Ferhad Khosrokhavar dans une tribune du journal "Le Monde" du 23 aout 2017 avec ce titre fracassant : " le Maroc exporte ses djihadistes" !!! Mais pour Jeune Afrique, c'est tout comme, bien que dans un calcul d'équilibriste et pour se prémunir de réactions critiques, l'hebdomadaire se soit fendu d'un éditorial du directeur de la rédaction, dans lequel François Soudan écrit ceci : " Suggérer comme l'ont fait des journaux espagnols ou britanniques, que le Maroc se débarrasserait de ses jihadistes en facilitant leur émigration vers l'Europe, voir qu'il existerait une sorte de prédisposition génétique des Marocains à l'extrémisme, n'a donc aucun sens". 

Mais pourquoi alors, si on ne l'a pas inspirée, voir commandée, avoir validé la couverture et distillé le venin et poison insidieux en utilisant le double langage et des méthodes hypocrites !? La couverture de "Jeune Afrique" n'est pas banale, anodine, insignifiante, à minimiser ou à innocenter pour que l'on se taise, mais l'expression d'une véritable cabale anti-marocaine sournoise. Il ne s'agit nullement d'une maladresse, d'un malentendu mineur, d'une simple mauvaise interprétation, d'un simple petit incident involontaire de parcours, mais d'une volonté délibérée et consciente, d'une initiative construite, bâtie, préméditée et réfléchie à l'avance pour stigmatiser le Maroc, lui jeter l'anathème et lui faire mal, très mal. 

On ne peut trouver une quelconque excuse à cela, en avançant l'hypothèse de la coïncidence avec les congés annuels, faisant en sorte que, lorsque le chat n'est pas là, les souris dansent. Si certains membres de la rédaction étaient en vacances, les adversaires du Maroc ne l'étaient pas visiblement et la responsabilité des dirigeants du magazine est pleine et entière. De ce fait, il ne s'agit pas de minimiser les faits, d'adoucir la portée de l'extrême gravité de l'attitude de "Jeune Afrique", d'atténuer ou de relativiser sa dangerosité pour ne pas insulter l'avenir, en se limitant à formuler de simples remontrances ou reproches comme par "dépit amoureux" auprès du magazine pour renouer avec la qualité des relations établis de longue date... Or on ne peut en sortir indemnes car tout cela, laisse des traces. C'est bien d'une instrumentalisation et d'une manipulation à mauvaise escient qu'il s'agit ! Dès lors, on ne peut taire ce sujet. 

NE PAS JOUER AVEC LE FEU !!!
Versant dans le sensationnalisme et ne cherchant qu'à vendre du papier, mû par l'appât du gain, l'esprit du lucre et la recherche de l'argent en faisant feu de tout bois pour s'attirer des lecteurs sur la base non pas d'analyse objective, mesurée et responsable, mais d'une démarche marketing caricaturale à l'emporte-pièce, le magazine "Jeune À Fric" comme le caractérisent certains (voir "La Nouvelle Tribune du Maroc" du 7 septembre 2017), joue avec le feu sur des sujets aussi sensibles et d'une extrême gravité.

La perception de la migration ne se fait pas en termes d'interdépendance positive en étant considérée comme un fait normal, mais elle conforte l'analyse en termes de méfiance, de péril, de source de danger mortel pour la société européenne et de menace pour sa stabilité. L'immigration marocaine dans les pays où elle réside devient ainsi un fait à combattre, l'analyse la concernant, faisant des Marocains LE danger dans les pays d'immigration. L'hypocrisie avec laquelle le dossier de "Jeune Afrique" est élaboré dans son ensemble avec plein d'amalgames et de stéréotypes, ne peut qu'avoir un impact ravageur, en jetant les Marocains résidant à l'étranger dans la gueule du loup, en mettant notamment leur sécurité en danger, aussi bien au niveau physique que moral. Désormais, ils seront d'office suspectés d'avoir commis, de vouloir commettre à l'avenir un attentat terroriste ou d'en être complices. Certains voudraient même que les permis de conduire marocains ne soient plus valables à l'échelle internationale...

Or, il n'y a pas de déterminisme génétique ou territorial au terrorisme. La radicalité violente et mortifère est une plaie mondiale à divers titres et n'a pas de frontière. La démarche établissant un lien entre terrorisme et marocanité, est simpliste, d'une grossièreté affligeante et constitue un procédé ignoble. Elle va notamment à l'encontre du vivre en commun ou du vivre ensemble dans beaucoup de pays d'immigration marocaine, en incitant à la xénophobie, en suscitant des réactions exacerbées de repli et de rejet de l'autre, d'islamophobie et de haine, en renforçant l'extrémisme de droite, en faisant son lit et en le banalisant, en excusant si ce n'est en légitimant des actes de violence multiforme. Avec la "une" racoleuse de l'hebdomadaire parisien, la ligne rouge est franchie. 

Au lieu de comprendre, d'expliquer, de faire comprendre par la pédagogie, la persuasion, la réflexion, le magazine préfère par cette couverture, pratiquer la stratégie de la terreur et du terrorisme intellectuel.

Il s'agit de sataniser et de diaboliser le Maroc et les Marocains, en frappant d'anathèmes tout un pays et une communauté, en s'en prenant à l'honneur et à la dignité de tout un peuple, en liant et en collant le nom du Maroc à la fabrication du terrorisme, au fait qu'il est le fief du terrorisme, à son origine et à sa source, en signifiant pratiquement que le Maroc est un pays terroriste, un pays du terrorisme, un pays qui enfante des terroristes, un pays semeur de mort et de larmes, un pays pourvoyeur de terroristes en Europe et à travers le monde, un pays géniteur de terroristes exerçant leur violence et folie meurtrières en Europe notamment. 

Tout comme il s'agit de désigner du doigt pratiquement tout détenteur de la nationalité marocaine (qui "ne s'acquiert ni ne se perd", a tenu par ailleurs à rappeler l'éditorial de l'hebdomadaire), comme un terroriste potentiel où qu'il soit et quel que soit son statut : ouvrier, cadre, commerçant, homme ou femme d'affaires, chercheur, sportif, étudiant, diplomate, visiteur, enseignant...

À titre d'exemple sur la dernière catégorie de MRE, surfant sur la peur de l'arabe et de l'Arabe, bien que le Front National en France soit déjà connu pour sa phobie des immigrés, et qui plus est des musulmans d'entre eux, et n'a nullement besoin d'encouragements pour continuer à attiser la haine, n'est-on pas en droit de s'interroger sur la concomitance de l'intervention-vidéo d'un élu lepéniste, Julien Sanchez, maire de Beaucaire (sud de la France) et conseiller général d'Occitanie et le message de la couverture que nous discutons ? 

Dans une vidéo publiée le 9 septembre 2017 sur son compte Facebook et relayée par Euro News, Julien Sanchez, accuse à tort et à travers le Maroc d'exporter le terrorisme ces derniers mois, en référence notamment aux attentats terroristes de la Catalogne, dont les auteurs étaient essentiellement des Marocains, et d'enseigner le terrorisme à travers les enseignants marocains de la langue arabe, engagés dans les écoles françaises pour enseigner l'arabe aux jeunes marocains, langue qui serait utilisée pour l'endoctrinement extrémiste religieux...


Dans cette vidéo, le maire d'extrême droite s'en est pris en effet violemment au dispositif de l'ELCO (enseignement des langues et des cultures d'origine), qui dispense selon lui un enseignement communautariste, dangereux pour la cohésion nationale et pour l'assimilation républicaine, contribuant à la "dénationalisation". Tout comme il a dénoncé le recrutement en France d'enseignants des pays étrangers comme le Maroc : " ce qu'il faut savoir sur ce dispositif, c'est que pour enseigner, l'Education nationale ne repose pas sur des enseignants français formés en France. Non, l'Education nationale fait confiance à des gens envoyés ou choisis par les pays concernés, en l'occurrence le Maroc ", déclare t-il. 

Et de s'interroger sur le parcours et l'identité de ces professeurs : "mais qui sont ces enseignants qui pénètrent dans nos écoles en période d'état d'urgence ? ", allant jusqu'à prétendre qu'ils sont à hauts risques, voir même carrément des terroristes : "Alors même que le Maroc a été ces derniers mois un grand pourvoyeur de terroristes islamistes, certains de ces enseignants sont-ils fichés S ? On nous demande donc de sécuriser nos écoles, mais nous ne savons pas qui pénètre dans nos écoles (...) car les maires n'ont pas accès à ces données ". 

Par conséquent, avec la couverture de Jeune Afrique en question, on atteint le summum de l'irresponsabilité et de l'amalgame recherché, avec parmi les objectifs, faire en sorte que le Maroc (avec tout ce qui fait sa personnalité) fasse peur, notamment aux touristes étrangers et aux investisseurs internationaux. Faire en sorte que les Marocains résidant à l'étranger (MRE) avec tout ce qui fait leur identité, soient vus désormais comme des MRRE, c'est à dire des Marocains radicalisés résidant à l'étranger, selon la formule d'Abdeslam Sarie dans "Dounia News" du 27 aout 2017. Faire en sorte que les Marocains à travers le monde, fassent peur à tout le monde et qu'ils soient mal perçus par tout le monde, en leur faisant subir la double peine et la double tare : l'obligation absolue de s'excuser continuellement d'être musulmans et d'être marocains. Le comble de l'approche cynique, suivie et "Born in Jeune Afrique" !!!

DES ÉMULES "BORN IN JEUNE AFRIQUE" ? 
Contrairement à ce qu'ont dit les responsables du magazine pour montrer leur prétendue bonne intention, le dossier intérieur auquel renvoie la couverture, n'est pas exempt lui-même d'ambiguïtés et d'amalgames. Ainsi, en conclusion au reportage fait à 30 km au sud de Khénifra, chef-lieu du Moyen Atlas, "dont quatre des dix membres de la cellule terroriste (de Catalogne) sont des enfants de Mrirt" (la majorité des terroristes étant "originaires du nord du Maroc"), il est affirmé que : "c'est donc autour du Moyen Atlas, connu pourtant pour être la région la plus tolérante du Maroc, de découvrir la haine qui sommeillait en certains de ses enfants exilés " ! 

Il s'agit donc ici d'une haine qui serait innée, du ressort du pays et de la société d'origine et non pas acquise dans le pays d'immigration pour des raisons qui lui sont endogènes. 

Quel est par ailleurs s'agissant du dossier lui-même, le bien-fondé de l'élaboration d'un certain nombre d'interviews dans le cadre de ce reportage avec des proches de ces meurtriers n'ayant plus aucune relation avec ces terroristes !? Ce choix éditorial, n'est-il pas déjà un a priori, participant de la confusion entretenue et de l'amalgame recherché ? 

Comme dans une sorte de division du travail et de répartition des tâches, et tirant profit des circonstances offertes, d'autres auteurs ne se sont-ils pas chargés, dans le cadre pourrait-on dire d'accointances douteuses, d'assurer d'une certaine manière et dans la même logique le service après-vente "Born in Jeune Afrique ", en enfonçant le clou !? 

C'est ainsi que dans un entretien avec l'historien Pierre Vermeren publié sur le site causer.fr le 30 août 2017 et repris à titre d'information par le numéro en date du 3 septembre 2017 de la revue de presse "Dounia News" sous le titre "Djihad : la diaspora marocaine échappe au contrôle de Rabat", la question suivante, pleine déjà d'amalgames et de confusions lui fut posée : "les terroristes de Barcelone, regroupés autour de l'imam de Ripoli qui ont commis les attentats des 17 et 18 août venaient (!!!) du Rif et du Moyen Atlas. Y'a t-il in vivier djihadiste (!) dans certaines régions marocaines (!) que Rabat peine à intégrer ?"

La question ne dit même pas que ces terroristes sont natifs de ces régions. Elle laisse entendre que ces terroristes sont venus de ces régions dans le cadre d'une connexion terroriste, ces régions jouant le rôle de préparation des attentats terroristes et donnant lieu à une exportation à partir de ce vivier djihadiste. 

La réponse de Pierre Vermeren maintient l'ambiguïté, même si certaines nuances sont apportées : "Ces jeunes terroristes viennent (!!!) pour partie du Maroc et pour partie d'Espagne. Mais la plupart d'entre eux sont arrivés en Espagne très jeunes lors de la grande migration des Marocains des années 1995-2001. Les régions les plus pauvres du Maroc périphérique du nord ont été pourvoyeuses de ces migrations : le pays Jbala, le Rif, l'Oriental et le Moyen-Atlas(...) Ces mêmes régions du nord du Maroc ont été le vivier de recrutement vers le djihâd syro-irakien il y'a quelques années (....)"

Et d'ajouter plus loin cette accusation de collusion et de connivence implicites des autorités marocaines en termes d'exportation de djihadistes, car qui dit exportation, signifie qu'il s'agit d'une opération planifiée et organisée par une partie dépendante ou agissant pour le compte de l'Etat marocain : " Au départ, les autorités locales dans le Rif et le Moyen Atlas, ont cru bon de se débarrasser des éléments les plus excités qui ont pu ainsi partir vers le djihâd syrien...mais cette politique s'est révélée vite désastreuse. Ces militants djihadistes (presque 2000) ont en effet fusionné sur place avec les "Marocains d'Europe" échappant à tout contrôle (parce que plus nombreux), constituant à terme un gros défi pour le Maroc". 

Deux jours plus tard (le 1er septembre 2017), un autre article dû à Driss Ghali (publié par causer.fr et diffusé pour information par Dounia News dans sa revue de presse), entonnait le même refrain. Dans cet article intitulé : "la diaspora marocaine, nouvelle main-d'œuvre privilégiée du terrorisme islamiste", l'interpellation suivante est lancée : "sommes-nous entrain d'assister à la transformation de la diaspora marocaine en pépinière de terroristes ?" 

D'autant plus que la diaspora marocaine présente, selon cette vision, une "double fragilité" dont l'une constitue selon nous, plutôt un stéréotype et un regard réducteur, faisant de la société et du pays d'origine, une, si ce n'est LA source de radicalité, comme s'il existait au Maroc une prédisposition génétique à la violence et au fanatisme. En particulier précise l'article, cette diaspora marocaine "reçoit en héritage une tradition qui ne contient aucun antidote contre la violence religieuse et le fanatisme. On se radicalise en quelques jours comme si on faisait un simple retour aux sources " (!!!) 

Pour son auteur, "il s'agit d'une main-d’œuvre de basse qualité et le seul "mérite" est d'accepter de mourir gratuitement sans exiger de pension pour sa famille ou d'entrer dans les livres d'histoire par la grande porte"

L'article pose par ailleurs la question de savoir si on n'assiste pas à "l'avènement d'une Moroccan-Connection mêlant trafic de drogue et terrorisme". 

Au total, voilà deux contributions qui cadrent bien avec l'esprit de la couverture de Jeune Afrique et que le magazine aurait pu insérer dans le même numéro comme illustration de sa vision ! Heureusement que "Dounia News" les a reproduites dans sa revue de presse pour inciter les lecteurs, dans une provocation intellectuelle, à répondre à ce genre d'analyse. 

Demain 2e partie
Rabat, le vendredi 22 septembre 2017

Abdelkrim Belguendouz 
Universitaire à Rabat, chercheur en migration 





 
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