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L'Ontario a établi un protocole d'éthique à l'intention du personnel de la santé au cas où une pénurie de respirateurs obligerait des médecins à faire des choix difficiles et privilégier certains patients par rapport à d'autres. Ces lignes directrices soulèvent toutefois des inquiétudes parmi des spécialistes, qui craignent que certains groupes ne soient laissés pour compte dans la lutte contre la pandémie de COVID-19.

Qui sauver, qui sacrifier? La question n'aura jamais été aussi difficile pour un médecin qui a prêté le serment d'Hippocrate. Selon l'éthicien René Villemure, les professionnels de la santé ne sont jamais à l'aise face à l'idée de prendre de telles décisions dans un contexte de ressources limitées. Le pouvoir de donner la vie ou la mort est un des plus grands qui soient, explique-t-il.


Le ministère de la Santé de l'Ontario a créé il y a moins d'un mois un groupe multidisciplinaire pour établir un protocole pour aider les médecins lorsque viendra le temps de prendre des décisions cruciales en cas de pénurie de respirateurs artificiels ou de lits dans les salles d'urgence des hôpitaux de la province.

C'est le Centre conjoint de bioéthique de l'Université de Toronto qui a été approché pour conseiller le gouvernement Ford sur les enjeux d'éthique médicale, bien que la stratégie ait été mise au point par la Société canadienne des soins intensifs.
Scénarios hypothétiques

Dans un communiqué, le ministère ontarien de la Santé explique qu'il a établi des règles pour répondre à une série de scénarios en période critique. Il ajoute toutefois qu'il s'agit d'un guide de dernier recours dans l'éventualité où le système hospitalier de la province n'arriverait plus à répondre à la demande.


Bioéthicien à l'Université de Toronto, Kerry Bowman précise que la province n'aura donc pas à l'appliquer si elle arrive à contenir la demande ou si la courbe des infections commence à s'aplanir dans les prochaines semaines.

Les patients atteints de COVID-19 seront donc répertoriés en fonction de trois méthodes de triage selon la gravité de leur état lorsqu'il faudra prendre la décision malheureuse de leur accorder ou non un respirateur.
  • Niveau 1 (pénurie modérée): les patients qui affichent un taux de mortalité prévisible de plus de 80 % ne pourront plus recevoir un respirateur.
  • Niveau 2 (pénurie sévère): seront exclus les patients qui ont plus de 50 % de chance de mourir même avec un respirateur selon plusieurs facteurs de comorbidité.
  • Niveau 3 (pénurie critique): seuls 30 % des patients auront droit à un respirateur.

Les critères évoqués ont l'apparence d'être neutres et basés sur des facteurs cliniques, mais ceux qui travaillent avec des personnes handicapées vous diront qu'il existe [dans notre société] beaucoup de présomptions sur la qualité de vie liée à leur handicap, dit-il en rappelant que ces perceptions ne sont pas forcément justes par rapport à la réalité que vivent ces gens.

L'Association canadienne des médecins pour la vie aurait aimé que ce protocole de la dernière chance insiste sur la dignité de la personne. Tout le monde mérite d'être soigné selon les meilleures capacités médicales et il serait arbitraire et mal venu d'abandonner des personnes âgées sous prétexte qu'elles sont moins utiles pour la société, explique sa directrice générale, Nicole Scheidl.

Notre société sera condamnée si elle décide de sacrifier les personnes faibles et vulnérables au profit des plus jeunes et en santé. Nicole Scheidl, Association canadienne des médecins pour la vie

Dommages collatéraux
Le triage a déjà commencé de toute façon pour les patients qui ne sont pas atteints du nouveau coronavirus et qui pourraient eux aussi faire les frais de la méthodologie de l'Ontario, selon la gravité de leur état et les priorités des établissements où ils sont hospitalisés.





 
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