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Dans cette deuxième partie correspondant au second volet de la table ronde, consacré au débat général et à la présentation d’un certain nombre de suggestions qui concourent à la création de meilleures conditions pour l’avenir, nous formulerons une quinzaine de suggestions qui viennent compléter celles déjà énoncées dans la première prise de parole. Ces 15 propositions prennent en considération l’ensemble de la thématique migrations et réfugiés telle que délimitée plus haut au sens large, incluant également le volet Marocains résidant à l’étranger qui est à discuter et non pas à considérer comme «hors sujet » ou hors de propos pour ne pas avoir assumer certaines responsabilités administratives ou politiques. 

1ère proposition : 
La déclaration de ce jour du Haut-Commissaire des Nations Unies pour les Réfugiés, Filippo Grandi, apprécie le fait qu’à l’occasion de la crise du covid19, l’action de solidarité suivie, ait intégré les réfugiés et les migrants dans l’action de protection. Dans le même esprit, il considère qu’il est primordial aussi de garantir l’inclusion des réfugiés et des déplacés dans les aspects socio-économiques de la réponse à la pandémie. En ce qui nous concerne, s’agissant des migrants et des réfugiés au Maroc, il s’agit d’inclure dans la réponse à la pandémie, non seulement son volet socio-économique, mais aussi ses aspects juridiques, politiques et institutionnels, la réponse au questionnement devant couvrir tous ces domaines. 

2ème suggestion : 
La SNIA ou Stratégie nationale d’immigration et d’asile est à maintenir, en la renforçant et en l’approfondissant. Conçue dans un esprit de solidarité, notamment avec les peuples africains, elle s’inscrit dans le cadre d’un projet sociétal moderniste et progressiste ouvert sur l’avenir. Rappelons que la SNIA vise 4 objectifs stratégiques : 
  1. Faciliter l’intégration (ou plutôt insertion) des migrants en les faisant bénéficier des mêmes droits que les Marocains, en luttant contre les discriminations les concernant et en leur assurant les conditions d’une vie digne et épanouie. 
  2. Mettre à niveau le cadre juridique et réglementaire en matière d’immigration et d’asile, dans le respect de la Constitution et des conventions internationales ratifiées par le Maroc. 
  3. Mettre en place un cadre institutionnel adapté. 
  4. Gérer les flux migratoires dans le respect des droits humains. 
À l’heure actuelle, il s’agit en particulier de faciliter et non pas de compliquer la procédure de renouvellement des cartes de séjour en introduisant de nouveaux écueils et des conditions supplémentaires. De manière plus générale, il y’a lieu de rendre plus visible et concrète l’action relative aux «Affaires de la Migration » qui ont disparu de l’organigramme ou architecture du gouvernement depuis la mise en place du gouvernement Elotmani II, alors que la «Nouvelle Politique Migratoire du Maroc » devrait être poursuivie pour des raisons d’abord internes, et en relation également avec le leadership assuré dans le domaine migratoire par le Maroc, au plus haut niveau de l’État, dans le cadre de l’Union Africaine, ce qui implique que le Maroc doit donner l’exemple. 

3ème recommandation : 
On ne connaît pas encore quelle pourrait être l’évolution de la pandémie covid-19 en Afrique, ce qui impactera nécessairement le Maroc au niveau migrations et déplacements humains. Toujours est-il que le continent africain doit faire face aux différentes menaces sanitaires et écologiques à venir. Il s’agit de mettre en avant notamment la question des réfugiés climatiques et face aux enjeux précédents, la démarche fondamentalement sécuritaire et de contrôle, ne saurait constituer la solution. Sur ce plan, relevons cet aspect de la vision du roi Mohammed VI, développée le 10 décembre 2018, dans le message à la Conférence intergouvernementale sur la migration à Marrakech: 
« La question migratoire n’est pas et ne devrait pas devenir une question sécuritaire. Répressive, elle n’est nullement dissuasive. Par un effet pervers, elle détourne les dynamiques migratoires, mais ne les arrête pas. La question de la sécurité ne peut pas faire l’impasse sur les droits des migrants : ils sont inaliénables. Un migrant n’est pas plus ou moins humain, d’un côté ou de l’autre d’une frontière. La question de la sécurité ne peut pas davantage faire l’économie de politique de développement socio-économique, tourné vers la résorption des causes profondes des migrations précaires. Enfin, la question de la sécurité ne peut pas nier la mobilité, mais elle peut la transformer en un levier de développement durable, au moment où la communauté internationale s’emploie à mettre en œuvre l’Agenda 2030 ». 
Il s’agit en fait de la sécurité humaine aux dimensions législatives, sociales, économiques, environnementales et droits humains. 

4ème proposition : 
Rester vigilant par rapport au risque de mise en place au Maroc de centres d’accueil des réfugiés dans le cadre de la politique européenne d’externalisation des procédures de l’asile. Entrant notamment dans le cadre du programme RECOMIG ou «Renforcement des capacités des collectivités territoriales dans le domaine migratoire », mettant en partenariat la coopération allemande d’un côté, et de l’autre côté la Direction de la Coopération, des Etudes et de la coordination intersectorielle du ministère délégué chargé des MRE (et auparavant des Affaires de la Migration), ces structures projetées comportent un grand risque. Celui de jouer le rôle de centres de rétention, de centres de tri pour les demandeurs d’asile en Europe, voir également de structures de «réception » des immigrés irréguliers marocains en Europe (et pas uniquement en Allemagne), ainsi que des immigrés irréguliers en Europe qui auraient transité par le Maroc. 

Toujours est-il que cette démarche est en totale contradiction avec la démarche fondatrice de la Nouvelle Politique Migratoire du Maroc, qui insiste sur la nécessité d’avoir au niveau fondamental, des politiques migratoires non répressives et non sécuritaires, mais au contraire soucieuses du plein respect des droits humains. 

5ème suggestion : 
Ne pas baisser la garde par rapport à la volonté persistante de l’Union Européenne, pratiquement depuis le début de ce siècle, de faire signer au Maroc un accord général de réadmission des irréguliers, des déboutés du droit d’asile et des apatrides non régularisés en Europe et qui auraient transité par le Maroc. En dépit du refus réitéré du Maroc d’y souscrire, le chantage et les pressions diverses n’ont jamais cessé, moyennant depuis quelques années, un soi-disant assouplissement dans l’octroi des visas aux Marocains, voir même en faisant miroiter, comme certains milieux en Espagne le font, un accord sur la migration similaire à celui conclu en 2016 entre l’UE et la Turquie, moyennant des contreparties financières alléchantes... 

6ème recommandation : 
Sans tomber dans la tentation tentaculaire, mettre en place une structure consultative, de dialogue et de concertation relative à l’immigration étrangère et à l’asile au Maroc, une sorte de Haut Conseil à l’Insertion des Immigrés au Maroc. Cet espace d’échange et de proposition aurait été très utile en cette période de pandémie. Ceci ne ferait nullement double emploi avec le CCME qui est consacré spécifiquement et constitutionnellement (article 163) à la communauté marocaine résidant à l’étranger. Le CCME précisons-le, n’a pas de prérogatives concernant l’immigration étrangère au Maroc. 

Dés lors, on ne voit pas le bien-fondé du reproche fait par son secrétaire général au gouvernement, de ne pas associer le Conseil à tout ce qui a trait à la politique gouvernementale en matière d’immigration et d’asile. Si au moins le CCME émettait des avis consultatifs en bonne et due forme concernant les politiques publiques marocaines relatives aux citoyens marocains établis à l’étranger, qui font partie de son cahier de charge (article 2 du dahir royal n°1.07.208 du 21 décembre 2007 portant création du Conseil), avec la mission prospective, consistant à fournir un rapport stratégique tous les deux ans sur les évolutions structurelles de la communauté marocaine à l’étranger (article 4 du même dahir) et les enseignements pratiques à en tirer par le gouvernement marocain dans le cadre d’une démarche anticipatrice !!! 

Toujours est-il que par rapport à cette pandémie et en plein confinement au Maroc, le CCME en tant qu’institution constitutionnelle de protection et de promotion des droits de l’Homme ne s’est nullement manifesté ni pour les immigrés au Maroc, ni pour les MRE, si ce n’est de manière incongrue et déplacée, par l’organisation pour les «Marocains du Monde » et ceux de l’intérieur... de «La Plus Grande Dictée du Monde »... en français sur...la marocanité !!! La seule autre allusion à la pandémie est la présentation des condoléances pour les familles dont l’un des proches a été victime du coronavirus à travers le monde, ainsi qu’un communiqué du CCME annonçant que son secrétaire général a versé un mois de son salaire au fonds de solidarité... 

7ème suggestion : 
Jusqu’à présent, il existe une commission interministérielle présidée par le Chef du gouvernement, chargée des affaires des Marocains résidant à l’étranger et des affaires de la migration. Conçue pour se réunir deux fois par an, elle devrait respecter cette régularité (voir même l’intensifier), ayant «zappé» à titre d’exemple les réunions de décembre 2017, décembre 2018 et décembre 2019, qui devaient être consacrées normalement aux «affaires de la migration», en relation avec l’opérationnalisation de la Stratégie Nationale d’Immigration et d’Asile (SNIA). À ce propos, la commission devrait justement être élargie à l’asile et aux réfugiés pour assurer le suivi, procéder aux arbitrages, anticiper..., faisant en sorte que le chef du gouvernement joue effectivement son rôle constitutionnel plein et entier. 

8ème proposition : 
Avec l’impératif de la rénovation de son modèle de développement, le Maroc devrait s’apprêter à s’engager dans un grand mouvement de réajustements, de réorientations, de ruptures et de réformes. Dans cet esprit, il s’agit de profiter du report de la présentation au Souverain du rapport final de la Commission Nationale pour le Modèle de développement (CNMD) en janvier 2021 pour intégrer la question des réfugiés et plus globalement la question migratoire dans ses deux grands volets : immigration étrangère et asile au Maroc et Marocains résidant à l’étranger dans les réflexions et les recommandations de la CNMD. La consultation des mémoires remis jusqu’ici par les partis politiques, les syndicats, des milieux universitaires et associatifs, des institutions consultatives, montre que la thématique migratoire, en dehors de quelques très brèves allusions, est pratiquement occultée. Cette thématique devrait donner lieu à un dialogue national ouvert, à organiser cet été 2020 par la CNMD. Évitons par conséquent qu’elle ne figure parmi les «oublié(e)s» de la réflexion collective pour le renouvellement du modèle de développement national. 

9ème recommandation : 
La crise sanitaire a mis en lumière l’énorme gâchis constitué par l’exode des compétences marocaines, notamment médicales et paramédicales, à travers notamment le cas du Dr Moncef Slaoui aux États Unis d’Amérique, ou bien des compétences médicales participant à l’équipe médicale du Pr Raoul de l’IHU de Marseille lors de la visite que lui a rendu en plein confinement le président de la République française, Manuel Macron. Bien entendu, ces compétences médicales et paramédicales ont participé à sauver des vies humaines dans le monde et à combattre la pandémie. Mais pour l’avenir, dans le cadre de la priorité à donner notamment à la question de la santé, comment faire face à ce gaspillage pour le Maroc ? On ne peut continuer à concevoir la fuite des cerveaux comme une simple mobilité des compétences, dans le cadre du respect de la libre circulation des personnes et de l’impératif de la mondialisation. 

C’est ainsi qu’au lieu de parler d’exode des cerveaux ou de la notion «négative » de fuite des cerveaux, on préfère dans une terminologie plus « attrayante » et enjolivée, leur substituer la notion de mobilité internationale comme pour les banaliser, et montrer que c’est quelque chose de normal et concerne tous les pays dans le cadre de la mondialisation. De même, au lieu de parler du «modèle traditionnel » du «brain-drain » (fuite des cerveaux), on lui substitue le «nouveau modèle » du «brain-gain » (gain des cerveaux) qui insiste sur la circulation des talents et élites en direction de leur pays d’origine. 

Or ce n’est pas user d’un discours culpabilisant ou moralisateur que de parler de pillage et de gaspillage des compétences, et de migrations contraintes ou subies, en termes de fuites organisées des compétences, comme celle révélée avant le Codiv-19 par «l’affaire ATOS », entreprise française connue pour ses opérations de recrutement continu au Maroc de profils IT marocains pour le compte du marché français, au détriment des besoins du Maroc. 

C’est le cas aussi de l’initiative lancée au Maroc en été 2019 pour former (au niveau linguistique en particulier), du personnel médical et soignant marocain demandé en Allemagne. En effet, le 2 juillet 2019 a été lancé le programme allemand en sciences de la santé par l’École supérieure des sciences de la santé (ESSS) à Casablanca, en partenariat avec notamment la Société allemande pour l’éducation et le travail (GBB), l’institut Goethe, l’Université de médecine de la charité de Berlin et le Centre allemand des affaires. Dès la rentrée universitaire 2019-2020, le programme de recrutement ciblait notamment quatre catégories qui participent toutes, de l’exportation des compétences, alors que le Maroc en a grandement besoin au niveau de toutes les régions comme l’a montré notamment la crise sanitaire du covid19 : les médecins, les infirmiers, les professionnels de la rééducation à savoir les kinésithérapeutes, orthophonistes, psychoptriciens, diététiciens, infirmiers auxiliaires... 

Certains ont même «thèorisé » et amplement justifié ce genre de pratique, en plaidant au Maroc pour la multiplication de l’offre de formation pour répondre à la demande du marché intérieur et extérieur (!!!), y compris au niveau des compétences médicales et paramédicales. 

10ème proposition : 
Lors de cette crise sanitaire, la gestion du dossier des Marocains bloqués à l’étranger qui se sont considérés comme des exilés et celui des Marocains légalement établis à l’étranger (MRE) et binationaux bloqués au Maroc, en raison de la fermeture des frontières marocaines, a été désastreuse, avec une absence totale de communication et un silence arrogant des responsables ministériels en la matière. Elle constitue une tâche sombre dans l’expérience marocaine de lutte contre le covid19, qui n’a pas manqué pourtant d’aspects positifs comme la proclamation de l’état d’urgence sanitaire, les mesures préventives prises, la décision du confinement, l’implication des unités médicales des Forces Armées Royales, la création du Comité de vigilance économique qui constitue le bras financier de cette bataille contre le COVID-19, permettant de prendre notamment des mesures socio-économiques pour remédier autant que possible aux conséquences de la baisse de la production, de la diminution du pouvoir d’achat et de la consommation. 

Ces dossiers des Marocains bloqués à l’étranger et des MRE bloqués au Maroc (venus notamment pour visite familiales, régler des problèmes divers ou suivre leur projet d’investissement), ont dévoilé un sérieux problème de gouvernance : qui fait quoi, sous les ordres de qui ? En fonction de quels critères et de quels objectifs, les décisions ont-elles été prises ? 

S’agissant spécifiquement des MRE bloqués au Maroc, les raisons de leur blocage restent incompréhensibles d’un point de vue sanitaire. Leur départ du Maroc n’est-il pas justement un «problème » en moins, d’autant plus que leurs pays de résidence acceptaient de les recevoir !? La crise les concernant, comme celle relative au blocage au Maroc d’un grand nombre de binationaux, notamment marocco-belges et marocco-néerlandais (résolue partiellement entre temps du fait de la pression de l’opinion publique dans les pays respectifs sur leur(s) gouvernement(s), a montré notamment l’absence totale de Stratégie nationale globale, cohérente et intégrée en matière de MRE, une crise de sens et de signification de la politique marocaine à suivre en direction des citoyens MRE. 

11ème suggestion : 
Il y’a un devoir de réparation morale à l’égard des citoyens MRE et des binationaux qui ont été «séquestrés » au Maroc, méprisés et malmenés au niveau de leur citoyenneté marocaine. Le rétablissement de la confiance en direction des citoyens MRE est absolument indispensable. Dans cet esprit, le recouvrement par les MRE de leur citoyenneté intégrale, sans amputation aucune, avec l’effectivité de leur droit à la représentation parlementaire à l’horizon des élections législatives de 2021, conformément au discours solennel du 6 novembre 2005 et de l’article 17 de la Constitution rénovée de 2011 est une urgence absolue. La question sera-t-elle enfin tranchée positivement par l’Exécutif avec l’ouverture du dialogue entre le gouvernement et les partis politiques, en particulier sur le code électoral relatif aux élections législatives 2021 ? 

12ème recommandation : 
Dans le même esprit, il nous paraît important d’envisager de manière participative, l’élaboration d’une charte nationale des droits et devoirs des citoyens marocains résidant à l’étranger par rapport au Maroc, déterminant au même moment la nature des relations des citoyens MRE avec l’État et la société marocaine. Ceci est d’autant plus indispensable en l’absence d’une stratégie nationale globale, cohérente et intégrée en matière de MRE, qui donne du sens aux politiques marocaines suivies en leur direction. 

Clarifions à ce niveau notre pensée. Notre analyse n’est nullement «extrémiste», «nihiliste» ou «excessive». Quand on procède à une analyse rétrospective des vingt ou trente années écoulées, on constate que dans l’évolution des politiques marocaines en direction des MRE, il y’a bien eu des avancées au plan constitutionnel, des acquis en termes de droits humains, des réalisations au plan institutionnel, des plans d’action, des mesures concrètes etc.., mais en 2020, on n’a pas encore une vision d’ensemble dans lesquels s’inscrivent ces mesures ponctuelles ou plans d’action, aussi positifs soient-ils. Ce constat est fait même par la plus haute autorité du pays qui avait procédé dans le discours du Trône 2015, à un rappel d’avoir impérativement cette stratégie nationale globale, cohérente et intégrée en direction des MRE. Mais depuis cette date, aucun effort gouvernemental significatif n’a été entrepris en ce domaine. 

Il s’agit aussi de tirer toutes les leçons, dans le domaine migratoire, liées à l’expérience marocaine de lutte contre la pandémie du coronavirus, en matière notamment de droits des binationaux et des Marocains résidant à l’étranger, de rejoindre les pays de résidence. 

13ème suggestion : 
Faire bénéficier les étranger au Maroc du droit de vote aux prochaines élections locales, prévues en 2021, comme le stipule l’article 30 de la Constitution rénovée 2011: «les étrangers jouissent des libertés fondamentales reconnues aux citoyennes et citoyens marocains, conformément à la loi. Ceux d’entre eux qui résident au Maroc, peuvent participer aux élections locales en vertu de la loi, de l’application de conventions internationales ou de pratiques de réciprocité ». 

Relevons à ce niveau qu’un certain nombre de pays d’immigration (marocaine) en Europe prévoient déjà, sans réciprocité, le droit de vote des étrangers (dont les Marocains) au niveau local. Il s’agit notamment de la Belgique, des Pays-Bas, de la Suède et du Danemark...L’Espagne quant à elle, qui abrite près d’un million de MRE, impose constitutionnellement un accord de réciprocité avec les pays d’origine des immigrés en Espagne (comme c’est le cas avec un grand nombre de pays latino-américains), ce qui exige de Rabat, l’ouverture d’un dialogue en la matière avec Madrid. 

14ème proposition : 
Instituer un agenda national de la recherche en migration avec un financement marocain (pour répondre aux besoins nationaux) et un partenariat scientifique entre chercheurs, décideurs et gestionnaires du dossier migratoire dans un esprit ouvert, transparent, inclusif et non pas dans un esprit discriminatoire et sectaire comme le «partenariat » qui vient d’être préparé et lancé en catimini en plein confinement par la Direction de la coopération, des études et de la coordination intersectorielle relevant du ministère délégué chargé des MRE (qui est le chef de file du projet au Maroc) et ce, par la création d’un Comité National Marocain du Réseau Académique Nord Africain sur la Migration (NAMAN), financé par l’Union Européenne et mis en œuvre par l’ICMPD (Vienne), dont la vocation très sécuritaire est connue 

Ainsi, parmi les recommandations centrales de la conférence 2019 de l’ICMPD sur les migrations, dans le cadre de la politique migratoire de l’Union européenne pour les cinq prochaines années (à l’occasion du changement de Commission européenne) figurent celles relatives aux thématiques suivantes : 
  • assurer la sécurité des frontières ; 
  • élaborer des politiques de retour et des pratiques de retour plus efficaces ; 
  • élaborer et mettre en pratique une approche globale des routes migratoires (qui suppose notamment une analyse des risques migratoires dans les régions d’origine). 
15ème recommandation : 
Faire prendre en charge la dimension réfugiés par l’Observatoire National des Migrations qui doit être fonctionnel et efficient. Cette institution qu’il est urgent de réformer substantiellement et d’activer, à la veille de la mise en place à Rabat de l’Observatoire Africain des Migrations, doit prendre en considération non seulement l’immigration étrangère et l’asile au Maroc, mais aussi l’émigration du Maroc vers l’étranger (nationaux et étrangers) et la communauté marocaine établie à l’extérieur des frontières nationales. 

En d’autres termes, il s’agit de ne pas dupliquer les observatoires marocains sur la migration, en cantonnant chacun dans un domaine déterminé, mais de traiter de toute la thématique migratoire à la fois, d’agir et d’assurer la synergie dans le cadre d’une démarche globale, cohérente et intégrée, sachant par ailleurs que pour un même pays, en premier lieu le pays hôte de l’institution panafricaine, à savoir le Maroc, l’Observatoire Africain des Migrations, ne devrait avoir normalement qu’un seul interface ou point focal pour éviter la cacophonie, les données contradictoires, les double emplois... 

Relevons que l’action de l’Observatoire Africain des Migrations, qui va être installé à Rabat sous l’égide de l’Union Africaine, se fera sur la base du triptyque «comprendre, anticiper et agir », avec comme mission de développer l’échange d’informations entre les pays africains afin de favoriser et de mieux appréhender la gestion du dossier migratoire. 

Par ailleurs, dans le cadre d’une approche réellement inclusive et d’une démarche proactive relative aux migrations exigeant des actions collectives, l’implication ouverte des chercheurs en migration, toutes disciplines confondues, sans exclusion aucune et dans le respect du pluralisme existant, doit être la règle au niveau de l’Observatoire National des Migrations pour jouer un rôle fondamental en matière d’élaboration, d’analyse, de suivi des politiques migratoires et en tant que force de propositions pour l’action concrète du Maroc en ce domaine. 

Rabat, le 19 juin 2020


Abdelkrim Belguendouz 
Universitaire à Rabat, chercheur en migration 




 
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